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Le juste prix de la taxe carbone
jeudi, 27 août 2009
/ Karine Le Loët / Rédactrice en chef à « Terra eco ». |
L’OCDE avait préconisé 100 euros. Rocard, 32. Le gouvernement, par la voix de Chantal Jouanno, a annoncé qu’il entendait plutôt fixer le prix de la tonne de carbone entre 14 et 20 euros. Raison invoquée ? « L’idée, c’est la pédagogie, on n’est pas là pour matraquer les Français », a assuré la secrétaire d’État, qui redoute l’effet pénalisant de la taxe. Mais quel est donc le juste prix de la tonne de carbone ?
32 euros la tonne : la théorie Rocard
L’ancien premier Ministre ne l’a pas sortie d’un chapeau. Non. Ce chiffre, Michel Rocard l’a pêché dans un rapport de la Commission de la valeur tutélaire du carbone. Un nom barbare pour désigner un groupe d’économistes et d’ONG chargés, sous la tutelle d’Alain Quinet, de livrer un outil pour mesurer le coût environnemental des projets publics. "[Une taxe à 32 euros] devrait donner un signal viable tout en permettant au système de s’adapter dans le temps", souligne ainsi le rapport Quinet qui préconise une augmentation de la taxe de 5% par an jusqu’à parvenir à 100 euros en 2030. Objectif ? Atteindre le fameux facteur 4, soit la réduction de 75% des émissions en 2050. "En gros, nous sommes partis de l’objectif de 100 euros en monnaie constante [hors inflation] et nous sommes remontés dans le temps, explique Patrick Criqui, directeur du laboratoire d’économie de la production et de l’intégration internationale (Lepii) qui a participé à la commission Quinet. D’autres experts défendaient l’idée d’une taxe à 45 euros avec une progression de 4%. Mais nous avons préféré ne pas commencer trop fort pour une meilleure acceptabilité." "32 euros c’est correct, confie l’eurodéputé Pascal Canfin. C’était grosso modo la valeur des permis d’émission [sur le marché d’échange européen] en 2008. Cela fait sens économiquement et politiquement."
Progresser rapidement, redistribuer intelligemment
Qu’importe le prix de départ, pourvu que celui-ci progresse rapidement, tempère le WFF. "C’est vrai que ce n’est pas un bon signe que le gouvernement veuille baisser le niveau de départ de la taxe. Mais l’important c’est qu’il conserve son objectif d’atteindre 100 euros en 2030. Il faudra juste augmenter la taxe plus vite, souligne Damien Demailly, chargé du programme Energie–Climat pour l’ONG. C’est cette progressivité qui est importante. Parce que les gens ne vont pas changer leur attitude du jour au lendemain, acheter une nouvelle voiture ou isoler leur maison." Pas question en effet que le bénéfice de la taxe vienne éponger le déficit de l’État. La solution ? Un chèque vert comme le préconise Nicolas Hulot. Oui, à condition que quelques contraintes existent. "Si on vous donne de l’argent, il ne faut pas que vous l’utilisiez pour acheter un billet d’avion supplémentaire. Il faut introduire un principe de chèque ou de carte verte qui est destiné à la consommation de biens et de services compatibles avec le Facteur 4 de Copenhague : produits éco-responsables, chaudière performante ou encore services de proximité.... "Ça risque de tout compliqué, estime au contraire Patrick Criqui. Qui va faire la liste des produits ? Quels seront les produits éligibles ? Je ne suis pas favorable à ça. Il y a déjà beaucoup de procédés d’incitation (fiscale, tarif de rachat de l’énergie renouvelable) qui sont déjà assez complexes. Il vaut mieux s’en tenir à un chèque vert classique. Aux ménages d’en faire ce qu’ils veulent."
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Photo : rahegp