https://www.terraeco.net/spip.php?article6237
|
Du SEL dans l’économie
dimanche, 3 juin 2007
/ Raphaël Didier / Enseignant en économie-droit en BTS |
Le Système d’Echange Local (SEL) est arrivé en France au début des années 90. Ce moyen d’échange n’est pas basé sur la monnaie officielle. Toute personne peut participer, selon le principe que nous créons tous de la valeur par nos connaissances, notre savoir-faire, ou notre culture.
Quelques chiffres pour commencer : la moitié de la population mondiale vit avec moins de 2 euros par jour. La fortune des 793 milliardaires de la planète en 2006 correspond presque au montant de la dette extérieure de l’ensemble des pays pauvres de la planète…20% des habitants de la planète se partagent 80% des richesses.
Avec de tels chiffres, inutiles de tergiverser longtemps pour comprendre que l’économie mondiale est très largement inégalitaire (hétérogène pour être pudique). Dans ce cas, il n’y a qu’une seule alternative : subir la pauvreté, ou restructurer solidairement l’économie. Car chaque femme et chaque homme à en lui, de manière intrinsèque, quelque chose à offrir et à échanger. Nous créons tous de la valeur sans même nous en apercevoir. A preuve, je citerai le fait de savoir jouer d’un instrument et d’en faire profiter les autres, que ce soit sous forme de cours, ou autre.
L’idée fit alors son chemin outre-atlantique, pour finalement aboutir à la création en 1994 du premier Système d’Echange Local (SEL) en France : le SEL pyrénéen. Ce qui est important à comprendre, c’est que la volonté des gens à vouloir échanger et leur confiance dans le système a suffit à bâtir un véritable système économique parallèle au système officiel, et ce, sans avoir d’argent ! Aujourd’hui, le concept à essaimé, et on compte plusieurs centaines de SEL sur notre territoire.
De manière pratique, les échanges se font de gré à gré par l’intermédiaire d’une unité locale de compte : le grain de sel. Celui-ci est basé sur le temps passé, le travail effectué, ou la valeur d’usage et non sur la valeur marchande : ainsi, à Toulouse le grain s’appelle « le cocagne », à Paris « le piaf », à Bordeaux « le bouchon »... L’association locale édite régulièrement les offres et demandes de chacun et les adhérents se contactent individuellement ou se rencontrent lors de nombreuses manifestations conviviales. Après l’échange, ils tiennent à jour leurs comptes sur un simple carnet par exemple. Dans cette forme d’échange, point de rentabilité, d’agios,…
Pour finir, précisons que ce système, qui concurrence à priori le système économique officiel, échappe à la fiscalité obligatoire pour l’instant. En effet, les transactions ne sont pas assujetties à la TVA par exemple. Gageons que l’Etat prendra conscience que ce système, de par sa vertu solidaire et son faible volume d’échange, ne représente en rien un « risque fiscal ». Il serait en effet totalement irresponsable de briser une telle dynamique d’entraide qui permet d’améliorer le quotidien des personnes. Ne s’agit-il pas là d’un véritable effort de cohésion sociale, expression à la mode ces derniers temps ?