https://www.terraeco.net/spip.php?article58403
|
Dans ses rayons, Intermarché fait plus de place aux moches
jeudi, 5 février 2015
/ Amélie Mougey
|
Les légumes et les fruits hors calibre ont fait leur retour dans les bacs de l’enseigne, mais aussi sur nos écrans. Car l’opération antigaspillage est aussi une campagne de com bien huilée. L’occasion d’un bilan chiffré.
Et les retenus du casting sont : une clémentine introvertie, une pomme bizarre et une carotte démotivée. Pour leur dernière campagne, léchée et efficace, les publicitaires d’Intermarché remettent à l’honneur les fruits et légumes moches, ces produits mal calibrés snobés par les hypermarchés. Du 19 janvier au 2 février, ces végétaux mal dans leur peau vous ont peut-être attendri sur écran avant que vous ne les croisiez en rayons. Près d’un an après leur première apparition, dans l’Intermarché de Provins, en Seine-et-Marne, ces parias de la grande distribution poursuivent leur réhabilitation. L’enjeu est colossal. Chaque année, un million de tonnes de produits consommables sont jetés avant même d’arriver sur les étals à cause de leurs petites imperfections. En volume, cela représente quelque 3 millions de mètres cubes. Concrètement, nous remplissons chaque année plus d’un Stade de France ( 2,2 millions de mètres cubes) à ras bord de produits – fruits, légumes, mais aussi céréales ou camemberts – mis au rebut car mal fichus. Pionnier de cette lutte antigaspi, Intermarché hésite encore à passer la seconde. Explications en chiffres.
Trois vidéos ont circulé sur Internet et à la télévision pour promouvoir l’achat de légumes moches. C’est le quatrième volet de cette opération. Le premier a été lancé en mars 2014, soit quelques mois après que la dénonciation de la pêche en eaux profondes par l’ONG Bloom et de la dessinatrice de bédé Pénélope Bagieu écorne l’image d’Intermarché. L’enseigne s’est défendue d’un quelconque lien de cause à effet. « Ce sont des événements totalement séparés », assurait le directeur marketing du groupe au site de LSA. Délibérément au non, l’image a été redorée.
Deux semaines : c’est la durée de la nouvelle opération d’Intermarché, la plus longue réalisée à ce jour. Les deux premières expériences, menées en mars et juin dernier, ont duré deux jours chacune. La troisième s’est étalée sur quatre jours, en octobre dernier. « On avance progressivement, le succès de chaque opération sert à légitimer la suivante », explique Audrey Postros, à la communication du groupe. Sur cette lancée, pourquoi ne pas pérenniser l’idée ? De l’aveu du service de com, l’équipe d’Intermarché « est encore dans le flou » sur cette éventualité. Le premier point d’interrogation concerne l’organisation : « La filière des légumes non calibrés doit encore se structurer », affirme Audrey Postros. Autre inquiétude : les fruits et légumes moches, vendus à grand renfort de communication, trouveront-ils preneurs toute l’année ? Leur succès ponctuel le laisse présager.
1,5 tonne : c’est la quantité moyenne de fruits et de légumes moches écoulés par point de vente au cours des dernières opérations. « Un vrai succès », estime Intermarché, qui se réjouit de n’avoir rien eu… à jeter.
Cinq sortes d’aliments étaient concernés par la dernière mise en rayon d’aliments tordus : poireaux, carottes, pommes de terre, pommes et kiwis. « Ils sont choisis en fonction de leur saisonnalité », explique l’enseigne. L’été dernier, citrons et aubergines étaient donc à l’honneur. Les Gueules Cassées – une autre initiative de réhabilitation des légumes aux mensurations non standardisées – vont plus loin. En misant sur le succès d’une campagne de crowdfunding, cette association compte élargir sa gamme d’aliments aux camemberts au lait cru et aux céréales du petit déjeuner.
–30% : c’est la ristourne dont vous pouvez bénéficier en achetant un légume moche. Elle est la même chez Intermarché et chez Monoprix ou Auchan, qui participent à des opérations de ce type en accueillant des produits de la marque Les Gueules Cassées.
1 800 magasins, soit la totalité des magasins Intermarché, étaient invités à participer aux deux dernières opérations. Comme les points de vente sont indépendants, les directeurs de magasins sont libres de suivre l’initiative ou non. « L’opération est largement relayée dans nos catalogues, la plupart jouent donc le jeu pour ne pas décevoir leurs clients », explique Audrey Postros. Ainsi, en octobre 2014, 1 700 des 1 800 magasins ont accueilli des produits aux mensurations non standardisées. Intermarché tient en ce moment ses comptes pour déterminer si l’opération de janvier a connu le même succès.
A lire aussi sur Terraeco.net :
« Après les légumes, les Gueules cassées vont vendre des camemberts moches »
« Légumes moches pour soupe très populaire »
« Trois astuces pour limiter notre gâchis alimentaire »