https://www.terraeco.net/spip.php?article56125
|
Poisson-tomate : mariage juteux, mariage heureux
jeudi, 28 août 2014
/ Emmanuelle Vibert
|
L’aquaponie associe élevage de poissons et culture hors-sol, les déjections des premiers nourrissant les plantes. Un système qui pourrait rapidement passer au stade industriel…
Le poisson-tomate, une abomination OGM, genre le monstre de Frankenstein, avec des écailles et une chair rouge ? Pas du tout. Tomatenfisch, en allemand, est le nom de code d’un projet d’aquaponie ambitieux, officiellement baptisé Inapro, qui a démarré en janvier dernier et durera quatre ans. Avec six millions d’euros de subventions européennes, sur quatre sites de 500 m2 en Espagne, Belgique, Allemagne et Chine, 18 partenaires industriels et scientifiques vont tester un système dans lequel les plants de tomates se nourrissent des déjections des poissons tout en purifiant l’eau. Objectif ? Passer en mode industriel. Car l’aquaponie suscite l’espoir : le mariage entre élevage de poissons et culture hors-sol permet d’intensifier la production tout en économisant beaucoup de terre, d’eau et d’intrants. Pratiquée par les Chinois et les Aztèques dès l’Antiquité, cette technologie a refait surface dans les années 1980, en Australie et en Asie, et se propage peu à peu dans le monde, de Gaza à Haïti, de façon artisanale.
« La spiruline est une microalgue très en vogue qui contient 70 % à 80 % de protéines, des oligoéléments, des anti-oxydants, du fer, du magnésium, précise l’ex-financier. On pourra en faire des comprimés ou des boissons énergisantes. La coupler à l’élevage de poissons, c’est une idée de Catherine Jolivet, du lycée agricole de La Canourgue (Lozère), qui m’a donné plein de conseils. » Cette enseignante en aquaculture a mis l’hydroponie au programme des élèves de son lycée dès 2011. Pour développer le système sur 6 000 m2, Abder Abbaz a embauché un ingénieur en génie biologique, un autre en aquaculture et un responsable formation. Avec un investissement initial de 500 000 euros à un million, l’équipe prévoit une production de cinq tonnes de truites et de 500 kg de spiruline pour la première année, grâce à la quinzaine d’employés de l’Esat. « Il y aura un point de vente, des démonstrations et même des chambres libres pour les personnes qui viennent se former, détaille l’entrepreneur social. Car on veut à la fois créer un pôle de compétence, mettre en place une nouvelle filière et un pôle de recherche et développement, et dupliquer le modèle, une fois prêt, sur l’ensemble du territoire, avec la Croix-Rouge. » Le poisson-tomate a un nouveau cousin plein d’avenir : le poisson-spiruline. —