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Quand le mercure grimpe, la salamandre rapetisse
lundi, 31 mars 2014
/ Amélie Mougey
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Ceci n’est pas un proverbe chinois mais le résultat d’une étude menée par deux universités américaines. Les chercheurs soupçonnent le changement climatique d’influer sur la taille des amphibiens.
Quel est le point commun entre une salamandre et un pull en laine ? Soumis à de trop fortes températures, tous deux rétrécissent. C’est ce que suggèrent deux équipes de biologistes des universités du Maryland et d’Alabama dont l’étude a été publiée la semaine dernière dans la revue Global change biology. Les biologistes, intrigués par les effets du réchauffement climatique sur le développement des animaux à sang froid, ont prélevé près de 9500 salamandres dans la chaîne de montagnes des Appalaches (Etats-Unis). Ils les ont ensuite mesurées avant de comparer leurs mensurations à celles de leurs ancêtres conservés dans les musées d’histoire naturelle. Verdict : la taille des amphibiens nés après 1980 est en moyenne inférieure de 8% à celle de leurs aînés, ayant vécu avant les années 50. L’évolution est progressive. A chaque génération, chaque nouvelle salamandre est, à l’âge adulte, 1% plus petite que ses parents.
Comme les chercheurs s’y attendaient, le changement climatique est le suspect numéro un. Premier indice : les salamandres qui vivent en basse altitude, là où le réchauffement et la sècheresse s’accélèrent le plus, rapetissent plus vite. Selon les zones de prélèvements, leur taux de rétrécissement oscille entre 2% à 18 %. Les leçons de biologie sur les batraciens corroborent cette piste : ces animaux respirent par la peau et se complaisent dans les milieux humides. Or quand les températures grimpent et que l’humidité manque, l’activité de leur métabolisme augmente, (de plus de 7 % dans le cas de l’étude). Les salamandres brulent donc plus d’énergie. Elles deviennent alors plus goulues ou, si la quantité de nourriture à leur portée est limitée, plus chétives.
Ce résultat n’est pas vraiment une surprise. La revue Nature rappelle qu’en 2011 David Bickford, chercheur en écologie à l’université nationale de Singapour avait souligné le potentiel lien entre réchauffement climatique et taille des batraciens. Le chercheur accueille cette confirmation comme un nouvelle outil : « Comprendre pourquoi certaines espèces réagissent au changement climatique est vital pour nos futurs recherches. » Avec les salamandres, les experts du Giec (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) qui rendent aujourd’hui le deuxième volet de leur très préoccupant rapport sur le réchauffement climatique, pourront compter sur un nouvel instrument de mesure.