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Récit : Quand les pro-OGM tiennent salon
mercredi, 12 février 2014
/ Cécile Cazenave
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Les débats alters, c’est surfait. Pour changer, nous sommes allés à une réunion libérale et pro-OGM. L’auditoire était conquis…
Ce mercredi matin au Waknine, une brasserie de la très chic avenue Pierre Premier de Serbie, dans le XVIe arrondissement de Paris, un homme bien mis, en costume cravate, s’empare discrètement des deux derniers croissants mis à disposition sur le comptoir. « 60 en dix minutes, soupire la barmaid en faisant de gros yeux, il faut dire qu’ils sont délicieux… » Les invités du petit-déjeuner-débat intitulé « OGM, l’immense gâchis », ont, semble-t-il, faim. Le rendez-vous émane de la Fondation Concorde, « l’un des premiers think tanks généralistes de la droite modérée dans notre pays », comme le précise la présentation Web qui sort un rapport intitulé « Les OGM, une opportunité à saisir pour la France ». L’affaire semble sérieuse et urgente : les OGM, entend-on en préambule, sont désormais moins une question scientifique que politique.
Mais Philippe Chalmin, économiste à Paris-Dauphine, fondateur du cercle Cyclope qui publie chaque année un rapport sur les perspectives mondiales de « l’ensemble des marchés de matières premières, de l’ananas au zirconium en passant par les textiles, le soja, l’automobile ou même l’art », prend le temps de baguenauder. On apprend ainsi que c’est en entrant au Haut conseil des biotechnologies qu’il a su qu’une pyrale n’était pas une maladie, mais un insecte, et que les couches de sa petite-fille sont certes « GM free » (« sans OGM ») mais, bien que de marque suédoise, fabriquées en Turquie. La salle, essentiellement composée d’hommes sexagénaires avec un goût prononcé pour la cravate rouge, se marre. Comme Philippe Chalmin, en une expression quasi obsolète, s’adresse à elle en citant « la Chambre », on en conclut que la plupart sont soit députés, soit sénateurs.
Les deux dernières questions semblent plus problématiques. Est-ce décent qu’un quarteron de fournisseurs prennent le contrôle génétique de la planète ? Là, c’est clairement la faute des écolos. « Nos amis faucheurs ont joué la carte de Monsanto, explique Philippe Chalmin. Leur action a éliminé la recherche publique française. » Quant à l’obligation de rachat de semences chaque année, le risque est réel. « Balancer des OGM dans un milieu rural sortant de l’autosuffisance, c’est une erreur fondamentale », plaide-t-il. Comprenez : c’est mieux d’attendre d’être aguerri à l’économie marchande pour se mettre pieds et poings liés dans les mains des semenciers internationaux.