https://www.terraeco.net/spip.php?article52317
|
Pisa : « Il ne faut pas s’arrêter au classement »
vendredi, 6 décembre 2013
/ Alexandra Bogaert
|
Pisa, l’enquête internationale évaluant les compétences des élèves, place la France à la 25e position en 2012, en régression par rapport à 2009. Mais pour Bruno Suchaut, professeur en sciences de l’éducation, l’essentiel est ailleurs.
Bruno Suchaut, directeur de l’Unité de recherche pour le pilotage des systèmes pédagogiques à l’université de Bourgogne, estime que le grand enseignement de Pisa 2012, dont les résultats viennent d’être publiés, n’est pas tant dans le classement des Etats mais dans les écarts de performance, au sein de notre pays, entre les élèves.
Si l’intérêt de Pisa n’est pas dans le classement des pays, dans quoi réside-t-il ?
Il faut regarder ce qui se passe au sein de chaque Etat, comment se répartissent les élèves entre les très bons et ceux en difficulté. Pour la France, l’enquête révèle que les acquisitions des élèves ont baissé par rapport aux évaluations précédentes (l’enquête est réalisée tous les trois ans depuis 2000, ndlr). Mais en fait, s’il y a toujours de très bons éléments, les résultats sont tirés vers le bas par un nombre croissant d’élèves faibles. L’école prépare mal cette frange croissante d’élèves en difficulté à se débrouiller dans la vie quotidienne, ce qu’évalue Pisa et non les simples connaissances théoriques dans diverses disciplines. Et si l’on croise leurs résultats avec des indices socio-économiques, on se rend compte qu’ils font partie des moins favorisés.
Ne le savait-on pas déjà ? En quoi est-il important que la France continue à participer à Pisa dont l’organisation est coûteuse (534 000 euros cette fois-ci) ?
C’est vrai, d’autres indicateurs permettaient déjà de prédire l’évolution négative de la performance des élèves français. Mais Pisa a deux intérêts majeurs : il représente une base de données extraordinaires sur les systèmes éducatifs, qui vont alimenter de nombreuses recherches. De plus, d’un point de vue politique, l’enquête peut avoir un impact majeur, comme en 2000 en Allemagne. Le pays avait alors réalisé que ses résultats étaient moyens et que son système éducatif était à rénover, ce qu’il a fait. Pisa nous apprend aussi que l’argent investi dans l’éducation n’est pas la seule garantie de la réussite des élèves. La preuve avec le Vietnam, qui réussit mieux que nous. Mais attention, il faut aussi prendre garde à ce que cachent les résultats de Pisa. Dans les pays asiatiques, qui sont les meilleurs du classement, les enfants travaillent leurs cours le soir jusque 22 h ou 23 h, il y a une forte pression sur eux. Voulons-nous ça pour les enfants en France ?
JPEG - 6.1 ko 120 x 180 pixels |