https://www.terraeco.net/spip.php?article51573
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4G : les études d’impact en retard
mardi, 15 octobre 2013
/ Alexandra Bogaert
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Le déploiement de cette nouvelle technologie s’est fait sans études préalables évaluant ses effets sur la santé. Sans être alarmiste, l’Anses estime qu’il est temps d’évaluer et de limiter le niveau d’exposition du public.
La 4G est encore balbutiante. Mais, déjà, les radiofréquences qu’elle émet posent question. Dans son avis Radiofréquences et santé rendu ce mardi 15 octobre, l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) s’interroge sur les conséquences de cette nouvelle technologie qui déferle actuellement sur les grandes villes françaises.
Les experts constatent que ce « déploiement en cours ou à venir de nouvelles technologies de communications mobiles (LTE [1], 4G, etc.) se juxtapose à des services déjà existants », tels que la 2G et la 3G. « Il existe peu de publications relatives à l’exposition en LTE mais on peut s’attendre à une contribution supplémentaire à l’exposition du public », notent-ils en s’appuyant sur une étude allemande qui évalue que l’arrivée de la 4G va entraîner une hausse de 50% du niveau d’exposition du public aux ondes électromagnétiques.
Faut-il craindre pour sa santé ? Après avoir passé à la loupe un millier d’études scientifiques – certaines indépendantes, d’autres moins – réalisées entre avril 2009 (date du précédent rapport de l’Anses, à l’époque encore baptisée Afsset, sur le sujet) et décembre 2012, le groupe d’experts constate que les effets à long terme de cette exposition sont « incertains ». Actuellement, en France, 90% des niveaux d’exposition du public sont inférieurs à 0,7 V/m, alors que la réglementation fixe à 41 V/m le maximum autorisé pour la 2G, et 61 V/m pour la 3G.
Donc même avec une augmentation de 50% de l’exposition due à la 4G, on resterait loin des niveaux maximum autorisés. C’est ce que met en avant la Fédération française des télécoms en indiquant qu’« avec l’ajout de la 4G, l’exposition continuera d’être inférieure à 1/10ème des seuils OMS (Organisation mondiale de la santé, ndlr) dans plus de 99% des points, même si elle pourra augmenter un peu. Sur la base d’hypothèses hautes (émetteurs 2G, 3G et 4G fonctionnant, tous, à puissance maximale en même temps), l’ajout de la 4G conduirait à une exposition inférieure à 0,2 V/m dans plus de 50% des points et à une exposition inférieure à 1 V/m dans plus de 90% des points ».
Problème : « Des effets biologiques peuvent être observés en-deçà des valeurs limites d’exposition aux radiofréquences », notent les experts dans leur avis (voir encadré ci-dessous). Néanmoins, en l’absence de liens de cause à effet démontrés entre ces effets biologiques et d’éventuelles maladies qui en résulteraient, l’Anses ne propose pas de nouvelles valeurs limites d’exposition pour la population générale.
Dominique Gombert, directeur de l’évaluation des risques de l’Anses, a justifié ce statu quo. Lors de la présentation de l’avis à la presse, ce mardi, il a indiqué qu’en l’état actuel des connaissances, « rien ne permet de dire que la 4G va mener à des effets spécifiques de nature différente de ceux déjà constatés avec les technologies 2G et 3G ». Tout en admettant ensuite qu’« il n’y a pas d’étude scientifique sur le sujet dédiée à cette technologie »... Par mesure de précaution, les experts plaident donc pour que « ces développements technologiques s’accompagnent d’une maîtrise de l’exposition des personnes (qu’il s’agisse de l’exposition environnementale ou liée aux terminaux) » et pour qu’une étude d’impact préalable à chaque installation de nouvelles infrastructures – du type antennes relais – soit réalisée. Le but est de « simuler les niveaux d’exposition à venir afin d’éviter que, par endroits, on ne se trouve pas face à des points atypiques, où le niveau d’exposition moyen est dépassé », a poursuivi Dominique Gombert.
Dans la salle de presse comble, Etienne Cendrier a rongé son frein, avant d’interpeller directement les responsables de l’expertise collective : « Depuis 2009, on vous demande de faire des études sanitaires sur la 4G. Vous n’avez pas réagi ! Résultat : la population va encore jouer les cobayes », a accusé le porte-parole de l’association Robin des Toits. Marc Mortureux, directeur général de l’Anses, a indirectement reconnu que son agence aurait pu se mobiliser plus en amont sur la 4G, pour avoir une chance d’être entendue. Il est désormais un peu tard pour cela : « De toute évidence, on est entré dans une phase de développement commercial [de la 4G] », a-t-il admis avant de prononcer ce quasi aveu d’impuissance : « Notre rôle est d’émettre des recommandations. »
Au final, pour Etienne Cendrier, ce nouvel avis est « plus politique que scientifique. En fait, il accompagne le développement commercial de la 4G. On dit qu’il faut faire toujours plus d’études, ce qui repousse la prise de décision, et pendant ce temps le commerce se développe », constate-t-il, amer, pour Terra eco. Pourtant, d’après une étude Prixtel et Ipsos rendue publique au début du mois d’octobre, 74% des Français ne sont pas intéressés par une offre 4G. Ils ne veulent pas payer plus cher leur forfait, et ne voient pas ce que cela pourrait leur apporter. D’après la Fédération française des télécoms au contraire, « les réseaux 4G, qui sont en cours de déploiement, apportent des services mobiles à très haut débit, facteur d’innovation, de croissance, d’attractivité des territoires et de compétitivité des entreprises ». Il y a comme de la friture sur la ligne...
… une dizaine d’effets sanitaires potentiels ont été relevés par les experts de l’Anses. Le niveau de preuve apparaît toutefois trop « limité » pour que le lien de cause (radiofréquences) à effet (maladies) soit avéré. Quoiqu’il en soit, les études épluchées ont montré que les radiofréquences peuvent augmenter le risque de tumeur cérébrale, sur le long terme, pour les utilisateurs intensifs (30 minutes par jour seulement !) du portable sans oreillettes. L’expertise fait aussi apparaître des effets biologiques concernant le sommeil (augmentation du nombre de périodes de sommeil paradoxal), la fertilité mâle ou les performances cognitives. Les radiofréquences peuvent également provoquer un stress oxydant des cellules, voire enclencher une apoptose (les cellules s’auto-détruisent). Ces risques sont amoindris quand on a recours à un kit mains libres, quand on choisit un téléphone avec un DAS (débit d’absorption spécifique) le plus faible possible et qu’on réduit l’exposition des enfants. L’Anses rendra d’ailleurs un avis sur l’exposition des enfants aux radiofréquences au début de l’année 2014 et se penchera dès la fin de l’année 2013 sur le cas spécifique des électrohypersensibles.