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A la piscine, plongez dans le slip de vos voisins
jeudi, 27 juin 2013
/ Cécile Cazenave
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Sauter, nager, recommencer. L’été enfin arrivé, voici ce à quoi vous aspirez. Mais avant de faire trempette, sachez que dans les bassins vous rencontrerez un reste de déo, des cheveux… et les sécrétions des autres baigneurs !
Le cauchemar de la piscine, c’est le baigneur. Le dimanche matin, il débarque à la première heure avec ses deux mouflets, en slip et bonnet de bain, champion de la vie saine. Les mômes font semblant d’appuyer sur le bouton de la douche collective avant de courir en hurlant pour faire un grand plouf dans le premier bassin venu. On les suit, youpi ! Ces trois êtres humains constituent la première pollution dominicale de la piscine municipale. Après leur seul passage, il faudra des centaines de litres d’eau, des dizaines de grammes de chlore et des kilowattheures à gogo pour remettre d’aplomb le fragile équilibre biologique de la pistoche. « L’eau, c’est du vivant, ça demande à être réglé en permanence », explique Bernard Boullé-Giammatteï, le « Monsieur piscine » de la Direction de la jeunesse et des sports de la mairie de Paris. Car le nageur a oublié qu’il en était lui aussi constitué.
D’après l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, qui s’est penchée sur son cas, un individu seul nageant pendant une heure dans le grand bain constitue déjà une mini-marée noire. Il apporte, en vrac, les vapeurs de son déodorant, une poignée de cheveux qui dépassent, des poils plus ou moins drus, les reliefs de ses peaux mortes, un peu de morve de son nez, et, pincez le vôtre, les restes de pipi et de caca contenus dans son slip. Un nageur séjournant deux heures dans une piscine excrète entre 20 et 80 millilitres d’urine et produit entre 10 centilitres et 1 litre de sueur. Pour un chimiste, ce paquet-cadeau constitue un cocktail de carbone, d’azote et d’urée. Rien de très grave, tout se dégrade. Mais il faudra tout de même 7 grammes de chlore (dose moyenne versée par nageur) pour l’attaquer frontalement. Pour une piscine type de 25 mètres sur 15, comptez 4 000 heures d’ouverture et 130 000 personnes et faites l’addition… avant de vomir.
« C’est un signe que la piscine n’a pas été désinfectée correctement. Il s’agit d’un déficit de chlore et non d’un excès, comme tout le monde l’imagine ! », précise Claude Danglot, qui rappelle qu’un quart des agents de piscines municipales souffrent d’insuffisances respiratoires dues aux chloramines, qui peuvent également provoquer irritations oculaires et nasales.
L’absence de rigueur corporelle n’a pas que des conséquences chimiques. Pour diluer cette soupe, il faut en effet ouvrir l’eau du robinet et faire couler entre 80 et 180 litres d’eau neuve par baigneur. Vidanges, apports d’eau neuve et nettoyage des filtres : à la fin de l’année, près de 80 % de la consommation d’eau d’une piscine type est liée à l’hygiène. Sans compter que cette eau, chauffée et traitée, coûte bonbon : 11 euros par mètre cube, soit presque trois fois le coût de l’eau de ville. La différence entre une piscine où les baigneurs sont propres et le traitement, adapté, et une piscine façon cloaque mal géré peut atteindre près de 10 000 mètres cubes d’eau, soit 30 000 euros d’économie globale. Plutôt que de passer un savon au lecteur, nous le prions instamment d’en utiliser. —
Quand les plantes supplantent le chlore
Nager dans une eau sans chimie, en plein air, face au mont Blanc : c’est le choix fait par la mairie de Combloux, en Haute-Savoie, pour bâtir sa piscine municipale. Inaugurée en 2002 et surveillée comme le lait sur le feu par les services d’hygiène départementaux, elle est encore considérée comme expérimentale. Le plan d’eau, de 1 500 m2, est filtré par 14 000 plantes et la fréquentation limitée à 700 personnes par jour. La température, elle, dépend de la météo ! Alors que le principe est largement répandu en Allemagne et en Autriche, la phytoépuration demeure timide en France. A Montreuil, en banlieue parisienne, une piscine naturelle en milieu urbain devrait voir le jour en 2014. —
Le rapport de l’Anses sur les risques sanitaires liés aux piscines