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Le septième pot de yaourt
jeudi, 30 mai 2013 / Walter Bouvais /

Cofondateur et directeur de la publication du magazine Terra eco et du quotidien électronique Terraeco.net

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Le projet d’une vie consiste-t-il à accumuler sans fin, à meubler chaque instant, à traquer les promotions sur les côtes de porc ? L’édito de Walter Bouvais, directeur de la publication de Terra eco.

Pourrions-nous avaler plus de sept yaourts par jour, loger quatre voitures dans le garage, changer de lave-linge tous les six mois, de téléviseur à chaque Coupe du monde et de téléphone portable chaque semaine ? Absurde. Notre pouvoir d’achat ne le permettrait pas. S’il le permettait, nous ne disposerions ni de l’espace nécessaire ni du temps disponible pour utiliser pleinement ces biens. Si nous en disposions, l’épidémie d’obésité frapperait, à terme, toute la population. Si elle ne frappait pas, les ressources naturelles seraient, elles, mises au régime minceur. Si elles existaient en quantité infinie, l’énergie nécessaire à faire tourner cette société ne serait pas disponible, sauf à exploiter jusqu’à la dernière goutte de gaz de schiste et à tapisser la planète de centrales nucléaires, dont nos finances ne nous permettraient pas d’assurer la sécurité. Si, malgré tout, nous en arrivions là, la bombe climatique, saturée de gaz à effet de serre d’origine humaine, nous éclaterait à la figure. Et puis, le projet d’une vie consiste-t-il à accumuler sans fin, à meubler chaque instant, à traquer les promotions sur les côtes de porc ? Quelle place laissons-nous au farniente, à la réflexion, à la contemplation ? Comme l’écrit Patrick Viveret, dans Reconsidérer la richesse (Editions de l’Aube, 2010) (1), «  Qui, sur son lit de mort, préférerait gagner un milliard plutôt que de se réconcilier avec une personne chère ?  »

Un basculement salvateur se dessine

Il ne s’agit pas, en soi, de stigmatiser ces grandes boîtes plantées en périphéries de nos villes, dans lesquelles nous poussons notre chariot. Mais si l’on met en perspective une ou deux tendances, on prend conscience qu’un basculement salvateur est en train de se dessiner. L’édition 2013 de l’étude Ethicity sur la consommation responsable (2) indique ainsi que 48 % des Français cherchent à « consommer durable », quitte, pour 14 % d’entre eux, à consommer « moins de produits ». Un autre chiffre : en 2020, en France, 30 à 40 km2 de surfaces commerciales seraient désertées. Un tiers de la superficie de Paris transformé en linéaires fantômes ! Pendant ce temps, politiques et économistes entonnent le refrain des Trente Glorieuses et ergotent sans fin sur ce dixième de point de PIB que nous gagnerons, ou pas. Problème : le PIB et son corollaire, la société d’hyperconsommation, convenaient peut-être au XXe siècle. Mais pour tracer le chemin vers un nouveau monde, bâti sur une prospérité vraiment durable, il faut changer de boussole (3). —

(1) Le rapport initial, daté d’avril 2002 est à lire ici

(2) « Les Français et la consommation responsable »

(3) Quelle boussole imaginer, alors ? Lire, entre autres, les travaux récents du laboratoire The Shift Project