![]() |
https://www.terraeco.net/spip.php?article49495
|
![]() |
Le surimi nous mène-t-il en bateau ?
mardi, 30 avril 2013
/ Alexandra Bogaert
|
On croit manger du crabe quand il n’y en a même pas une pincée. On pense manger des protéines, mais c’est surtout de l’eau et des glucides qu’on avale.
Mise à jour le vendredi 4 avril 2014 : Quel lien entre le surimi et le cheval ? A priori, aucun. Pourtant, les bâtonnets de pâte de poisson - symbole du produit alimentaire industriel - ont bien eu à subir les conséquences du scandale de la viande de cheval, indique Lemonde.fr. En 2013, les ménages ont acheté 6,3% de bâtonnets en moins qu’en 2012. |
Serions-nous masos ? A l’apéro, en entrée ou en salade, nous préférons souvent le bâton à la carotte. Nous sommes les plus gros mangeurs de surimi – cet aliment à base de chair de poisson hachée présentée en bâtonnet – en Europe. Et le deuxième marché mondial après le Japon, d’où nous vient cette mixture cuite à la vapeur, débarquée dans nos assiettes en 1988. Aujourd’hui, nous engloutissons pas loin de la moitié (43%) des petites tiges orange et blanches vendues au sein de l’Union européenne. Soit 60 500 tonnes malaxées par nos estomacs en 2012. C’est cinq fois plus qu’il y a vingt ans. De quoi frôler l’indigestion ?
Le marché a reculé de 6% l’an dernier, en raison d’une météo estivale bien grise et d’un engouement moindre pour le régime hyper-protéiné de Pierre Dukan. Les marques peuvent toutefois remercier le nutritionniste car, en faisant du surimi le produit phare de sa méthode minceur, il leur a permis de conquérir, un temps, 500 000 nouveaux foyers. Avant de les perdre quasiment tous. Le fameux effet yoyo des diètes... Malgré cette baisse (de régime), pas loin de sept foyers sur dix en mettent dans leur panier, pour une consommation moyenne de 0,97 kg par personne, selon l’Association pour le développement des industries du surimi (Adisur).
Toute cette poiscaille passe à travers des machines qui l’équeutent, l’éviscèrent, lèvent les filets puis les lavent avant de hacher la chair, mélangée à du sucre. Ce « surimi base », pâte blanche peu goûteuse, est souvent préparé à bord des bateaux de pêche. Il arrive congelé dans les usines, où il est transformé. « Les consommateurs pensent encore que le surimi est fait à partir de déchets de poissons, alors qu’on travaille uniquement la chair », insiste Jean-Sébastien Tamisier, directeur général d’activité « Traiteur de la Mer » de Fleury-Michon et président de l’Adisur. Ils se trompent aussi s’ils pensent manger, dans les bâtonnets « saveur crabe », de ce crustacé. Car, au « surimi base », on ajoute surtout de l’amidon (de blé), de la fécule de pomme de terre, du sucre, du sel, du blanc d’oeuf, de l’huile de colza, du paprika pour la couleur et des arômes de crabe (naturels ou de synthèse, selon les marques). Les bâtonnets « saveur crabe » n’en contiennent donc même pas une pincée.
Le surimi est-il un produit régime ? L’aliment est peu calorique il est vrai : de 100 à 120 calories pour 100 grammes, contre 130 pour de la viande blanche ou du poisson maigre. Il ne contient pas de graisses saturées. Mais son taux d’oméga 3, très présent dans le poisson, est jugé « insignifiant » par Angélique Houlbert. Son taux de protéines est assez faible (entre 5 et 10%, contre 20% pour un poisson), et sa teneur en sel haute (jusqu’à 4 g pour 100g). « De plus, avec l’amidon et le sucre, les teneurs en glucides dépassent celles en protéines, ce qui n’en fait pas vraiment un aliment minceur », estime la nutritionniste. Pour Jean-Michel Lecerf, qui exerce la même profession à l’Institut Pasteur de Lille, « vous mangez un peu de protéines de qualité moyenne et avec peu de calories pour pas très cher ». Mais si vous ajoutez de la mayo, vous gâchez tout !
(1) éd. Thierry Souccar