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La cigarette électronique vous enfume-t-elle ?
vendredi, 26 octobre 2012
/ Alexandra Bogaert
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Tendance, la e-cig ? En tout cas, il s’en vend de plus en plus. Mais aident-elles vraiment au sevrage ? Et sont-elles vraiment inoffensives pour la santé ? Le flou demeure.
Farid aspire profondément. Concentré, il goûte une nouvelle saveur de tabac. « Celui-ci est encore un peu trop doux, mais il n’a pas d’arrière-goût écœurant. » Parole de spécialiste. Cet homme de 54 ans à la voix grave, qui a passé 40 années de sa vie avec une clope au bec, exhale un brouillard blanc, inodore.
Contrairement aux apparences, Farid a arrêté de fumer. C’était un lundi matin d’octobre. Adieu, les trente cigarillos par jour. « Pas le choix, mes poumons sont entamés », explique-t-il. Le vendredi suivant, il est de retour dans la boutique Alter Smoke, dans le 8e arrondissement de Paris, où il avait acheté sa cigarette électronique (e-cig) rechargeable. Il vient s’approvisionner en munitions. Mais à la place de paquets de 20, il repart avec des flacons de 30 ml de e-liquide, le produit qui provoque la vapeur blanche. Le magasin en propose quelque 60 saveurs – tabac, fruits, bonbons, épices, etc. -, sur les 250 disponibles en France. Elles sont déclinées en versions plus ou moins (voire pas du tout) chargées en nicotine. Pour Farid ce sera un récipient en contenant 19,9 mg/ml, la dose maximale autorisée.
Vapo-quoi ? Le terme, qui n’existe pas encore dans le dictionnaire, désigne l’acte de tirer sur une e-cig et, ce faisant, d’activer la batterie qui met en route la résistance présente dans l’« atomizer ». Elle chauffe entre 30 et 60°C, selon les modèles, le e-liquide versé dans une cartouche qu’on appelle le « clearomizer ». Aspiré, le produit se transforme en vapeur. On a l’impression que le vapoteur fume mais ce n’est pas le cas. Car il n’y a pas de fumée sans feu !
Depuis mai 2011 et une note de l’Afssaps (aujourd’hui Agence nationale de sécurité des médicaments) qui recommande de ne pas acheter ces produits, les pharmaciens n’ont plus le droit d’en vendre dans leurs officines. Parce que rien ne prouve que la cigarette électronique – dont les modèles récents ressemblent de plus en plus à un stylo plume - est une aide au sevrage tabagique. Rien ne prouve le contraire non plus...
Malgré tout, le produit n’est pas inoffensif. Il est déconseillé aux femmes enceintes et ne devrait normalement pas être vendu aux mineurs, puisqu’il contient de la nicotine, substance qui rend dépendant si elle est administrée par « shoot ». « Il faudrait savoir si la nicotine vapotée reste en bouche ou descend jusqu’aux poumons. Si c’est le deuxième cas, la dépendance au produit sera rapide », prévient le professeur. Pour lui, il faudrait taxer les cigarettes électroniques comme relevant des produits du tabac. Les taxes récoltées pourraient financer des études sur ces produits et s’assurer que ce ne sont pas de simples écrans de fumée. Euh, de vapeur.
« Les cigarettiers voient s’échapper une part de leur clientèle, qui se détournent des « tueuses » (les cigarettes classiques, ndlr) pour les e-cigs », explique Guillaume Desazars, de La Centrale vapeur. Pour les récupérer, le groupe Philip Morris a annoncé en juin vouloir mettre sur le marché une « cigarette à moindre risque » et électronique courant 2013. Par ailleurs, la société britannique CN Creative, qui fabrique et commercialise des e-liquides Outre-Manche, a décidé de faire reconnaître ses produits au titre de médicaments : elle a demandé, au Royaume-Uni, l’obtention d’une autorisation de mise sur le marché, préalable à une demande d’AMM européenne. Dans le cadre de la révision de sa directive européenne sur le tabac, la Commission européenne pourrait interdire prochainement l’usage de la cigarette électronique, faute de connaître ses effets sur la santé. Un principe de précaution qui s’applique déjà dans certains Länders allemands, où la e-cig est interdite.