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Le téléviseur à écran plat
jeudi, 3 juillet 2008
/ Cire
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/ Louise Allavoine
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Avec les écrans plasma et à cristaux liquides, le cinéma est entré à la maison. Mais la fin du film risque d’être cruelle pour la planète.
Et pour regarder les Jeux olympiques, vous serez assis devant quoi ? Vous aussi, vous avez dit bye bye à votre vieux poste de télé et accueilli un écran plat au milieu du salon.
Il faut avouer que trouver un téléviseur à tube cathodique en rayons sera bientôt mission impossible. Vieux, moche, encombrant, le récepteur a été mis sur la touche par le « flat », l’écran plat moderne et design. Si fin qu’il est possible de l’accrocher au mur comme un tableau. La planète gagne-t-elle au change ?
« La réponse est nuancée », reconnaît Stéphane Le Pochat, ingénieur au département écoconception et consommation durable de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe). Ni tout noir, ni tout blanc, le bilan de l’écran plat n’est pas non plus coloré en vert.
« A taille égale, le plasma est, en phase d’utilisation, plus gourmand en énergie que la télévision à tube cathodique. Mais ce n’est pas le cas du LCD, l’écran à cristaux liquides, expose le spécialiste. Seulement, la mode est au gigantisme. Et l’augmentation de la taille des téléviseurs annihile ce gain en énergie. »
Côté fabricants, on admet volontiers que plus l’écran est grand, plus il consomme d’énergie. Mais selon Jean-Robert Marenco, directeur marketing chez Philips, les écrans disponibles sur le marché, d’une taille moyenne de 80 cm de diagonale, ne sont pas plus gourmands que les derniers téléviseurs à tube cathodique d’environ 65 cm.
D’autant plus que la marque, deuxième dans l’Hexagone avec 23 % de parts de marché derrière Samsung, a fait de la consommation d’énergie sa nouvelle marotte. « La génération LCD qui sort actuellement consommera trois fois moins d’énergie en mode veille. »
Championnat d’Europe de football, Jeux olympiques, l’année 2008 est musclée. Or les grands événements sportifs dopent les ventes. Par exemple, la Coupe du monde de rugby 2007 a motivé l’achat de 720 000 écrans en deux mois – août et septembre –, soit une croissance de 84% par rapport à la même période de 2006. L’écran plat a donc ouvert de nouvelles perspectives à l’industrie audiovisuelle. Car le taux d’équipement des ménages – environ 30 % à ce jour – lui laisse présager encore de bien belles années.
Mais le boom de ces bijoux de technologie s’accompagne d’effets nocifs. Outre-Manche, on a chiffré la consommation électrique des « flat ». Selon des travaux réalisés par des démocrates libéraux, une hausse de 6 % du marché en volume d’ici à 2010 entraînera une augmentation de 64 % de la consommation électrique du parc national de téléviseurs.
Et les prouesses technologiques des fabricants nous promettent des écrans de plus en plus grands, donc de plus en plus gourmands. Par ailleurs, un écran plat ne va pas sans son lecteur DVD et son adaptateur TNT, sans oublier son boîtier de connexion ADSL. Lesquels majorent la facture, d’autant plus que le tout reste en veille. Ne cherchez pas le bouton off au bas de l’écran, la plupart du temps il a été supprimé. Ces appareils interconnectés doivent en permanence rester branchés.
Le télé-zappeur ne veut plus lever les fesses du canapé, avancent les fabricants. Et contrairement à l’ère cathodique, il n’attend plus que son écran tombe en panne sèche pour en changer. La durée de vie de l’écran plat a fondu de moitié par rapport à la télé classique, pour plafonner entre sept et huit ans. Le dépassement technologique pousse-t-il à changer plus vite de produit ?
« Parfaitement, répond Zeina Al-Hajj, responsable de la campagne Toxiques à Greenpeace. C’est une stratégie pour pousser à toujours consommer plus. » Chez Philips, on se défend de commettre le péché mortel d’obsolescence programmée (lire aussi Terra Economica n° 48, octobre 2007). « C’est un désir des consommateurs d’avoir un produit toujours plus performant », assure Jean-Robert Marenco.
La phase de fabrication est spécialement gloutonne. « La miniaturisation des composants appelle des procédés de plus en plus énergivores. Les matériaux doivent être plus purs, donc nécessitent davantage de traitements chimiques. On travaille à l’échelle moléculaire, dans des atmosphères contrôlées, avec des process très compliqués. C’est bien simple : plus vous êtes petit, plus vous consommez d’énergie, plus vous générez de déchets », détaille l’expert.
Difficile, pour autant, d’obtenir les chiffres d’émissions de gaz à effet de serre pour chacune des étapes de fabrication. Les marques, si elles mènent des analyses de cycle de vie, ne communiquent pas leurs données. Fièvre high-tech oblige, voilà un secret jalousement gardé. En outre, avec la mondialisation, ces données sont devenues très difficiles à rassembler.
Car les fabricants ne fabriquent pas, ils assemblent. La production des composants est confiée à des sous-traitants. Pour Greenpeace, « il s’agit pourtant bien de leur produit. Leur responsabilité est donc de maîtriser son cycle de A à Z ».
Grosse panne de recyclage
Que devient l’écran plat une fois que le consommateur s’en est lassé ? Décharge, incinérateur, recyclage ? Les téléviseurs, qu’ils soient à tube cathodique, plasma ou LCD, sont classés dans les « déchets d’équipements électriques et électroniques » (surnommés D3E). La directive européenne relative à ce type de déchets oblige les fabricants à organiser une filière agréée, financée par l’écoparticipation déboursée par le consommateur à l’achat : de 2 à 8 euros selon la taille de l’écran.
Renseignement pris auprès d’Eco-systèmes, l’éco-organisme chargé de leur retraitement en France, la filière existe mais les écrans plats, notamment les LCD, ne sont pas recyclés. « Il n’existe pas encore de technologie opérationnelle pour retraiter ces produits. En attendant, on les démonte et on stocke les dalles, confirme Richard Toffolet, directeur technique. Mais beaucoup de prestataires travaillent dessus. Le recyclage des écrans plats va devenir un gros marché. Aujourd’hui, le gisement est encore faible, à peu près 50 000 tonnes à l’échelle européenne cette année. Les flux devraient fortement augmenter à l’horizon 2010 pour atteindre 350 000 tonnes. En 2020, on estime à 1,4 million de tonnes la quantité d’écrans plats à recycler. »
Une filière de valorisation ne verra le jour que si elle est rentable économiquement, estime quant à lui Stéphane Le Pochat, ingénieur à l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe).
Un gouffre de matériaux rares
Si les fabricants, contraints par des réglementations strictes, ont fait des efforts considérables pour diminuer, voire supprimer, des matières toxiques de leurs produits, un écran plat constitue toujours un cocktail dangereux. « Pour les LCD, certaines lampes de rétroéclairage utilisent du mercure, un métal hautement toxique, explique Richard Toffolet, directeur technique à Eco-systèmes. Quant aux cristaux liquides, on a tout lieu de penser qu’ils ne sont pas toxiques. Mais, en vertu du principe de précaution, les recherches se poursuivent. »
Les écrans LCD contiennent également de l’indium, une ressource extrêmement rare. « C’est un produit de forte valeur. Il faut donc pouvoir le récupérer », ajoute Richard Toffolet. Quant aux écrans plasma, « le problème vient des poudres électroluminescentes. Si elles ne contiennent pas de cadmium, a priori, elles ne sont pas toxiques. Sinon, il faudrait les retirer. Et ce serait très difficile, parce qu’elles sont encapsulées dans le verre. »
7e édition du Guide pour une high-tech responsable de Greenpeace
La directive D3E expliquée sur le site du ministère de l’Ecologie
Le Syndicat des Industries de matériels audiovisuels électroniques (Simavelec)
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