https://www.terraeco.net/spip.php?article16535
|
Oui, le nucléaire émet bien du CO2
vendredi, 25 mars 2011
/ Clemente Alvarez - Ecolab
|
Certes, les gaz à effet de serre ne s’échappent pas des cheminées des centrales. Mais le nucléaire relâche néanmoins du CO2. Lors de l’extraction de l’uranium ou du démantèlement d’une centrale par exemple.
Une centrale nucléaire ne génère pas directement d’émissions de CO2. Ainsi, certains secteurs plaident en faveur du recours à ce type d’énergie pour lutter contre le changement climatique. Cependant, cette technologie n’est pas non plus exempte d’émissions de gaz à effet de serre, comme on l’entend souvent dire : elle émet évidemment du CO2, de manière indirecte. Comme nous l’avons déjà vu sur Eco Lab (le blog de l’auteur de cet article, Ndlr) avec un aérogénérateur ou un panneau photovoltaïque, pour mesurer de manière rigoureuse l’impact de n’importe quelle installation, il faut considérer le cycle de vie dans son ensemble : extraction des matières premières, construction de la centrale, gestion des déchets produits… C’est là que le CO2 est émis. Bien entendu, l’impact environnemental d’une centrale ne doit pas être réduit aux seules émissions de gaz à effet de serre (mesurées en tonnes d’équivalent carbone). Ses répercussions sur l’environnement sont bien plus larges. Mais la question du CO2 est déjà tellement complexe qu’elle requiert une analyse à part.
Pour connaître réellement les émissions d’un réacteur nucléaire, il faudrait mener une étude au cas par cas, pays par pays. Contrairement à ce qu’assure le Forum de l’industrie nucléaire, des études de ce type n’ont jamais été réalisées en Espagne (le pays de l’auteur de cet article, Ndlr). Cela impliquerait, pour une centrale espagnole, d’analyser les émissions de gaz à effet de serre générées à toutes les étapes : depuis l’extraction de l’uranium et l’élaboration du combustible nucléaire, jusqu’à l’enfouissement des déchets radioactifs, en passant par la construction de la centrale, son fonctionnement pendant presque 40 années et son démantèlement en fin de vie.
Dans le cas de l’Espagne, comme l’indique le Forum nucléaire, l’uranium utilisé par les centrales provient exclusivement de mines étrangères, principalement de Russie (45%), d’Australie (22%), du Niger (20%), du Kazakhstan (6%), du Canada (5%)… Le processus, qui consiste à transformer ce minerai en barres qui sont ensuite introduites dans le réacteur nucléaire, est beaucoup plus laborieux qu’une simple extraction. L’isotope utilisé pour la fission de l’uranium dans les réacteurs nucléaires est le U-235, qui se trouve en très faibles concentrations dans la nature. C’est pour cela que le minerai d’uranium doit être enrichi.
Si l’on espère que les centrales nucléaires plus modernes utiliseront à meilleur escient l’uranium disponible, certains craignent que les émissions associées à l’énergie nucléaire n’augmentent proportionnellement à l’énergie requise pour extraire un minerai de qualité. « J’ai conscience qu’à l’avenir l’empreinte carbone de l’énergie nucléaire augmentera à cause du minerai d’uranium, de la vétusté des centrales – dont la moyenne d’âge est déjà de 25 ans - et des besoins en énergie pour la gestion et le stockage des déchets », commente Sovacool.
Une autre étude encore plus récente, menée par des chercheurs belges et publiée dans la revue « Energy Policy » en 2009, compare trois travaux portant sur les émissions de CO2 des centrales nucléaires : une étude belge menée entre 1998 et 2000, qui chiffre les émissions à 7,72 g de CO2/kWh ; une autre émanant du gouvernement australien et datant de 2006, qui obtient 57,69 grammes ; une troisième enfin commandé par le Groupe Vert du Parlement européen en 2005, dont les calculs dépassent les 117 grammes. Ces travaux ont été choisis car ils sont représentatifs de ce que l’on peut trouver dans la littérature scientifique. Et de nouveau, ils donnent une valeur moyenne similaire à celle estimée par Sovacool. Après les avoir tous passés en revue, le chercheur belge Jef Beerten, de l’université de Louvin, a identifié des différences dans la méthodologie employée, les suppositions et les estimations, qui influenceraient de manière significative les résultats.
Cet article a été initialement publié sur le blog EcoLab de Clemente Alvarez hébergé par le site du quotidien espagnol El País.
cliquez ici et remplissez le formulaire de contact qui s’affichera |
ou écrivez à agir [at] terraeco.net |