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Les riches peuvent-ils sauver le monde ?
jeudi, 5 août 2010
/ Karine Le Loët / Rédactrice en chef à « Terra eco ». |
Aux côtés de Warren Buffett et de Bill Gates, 40 milliardaires américains se sont engagés à verser au moins la moitié de leur fortune à des organisations caritatives. Soit au minimum 117 milliards d’euros. Mais que peut-on faire avec une somme pareille ?
Ont-ils trop écouté la chanson popularisée par les jeunes de l’UMP Tous ceux qui veulent changer le monde ? Emmenés par Bill Gates – le fondateur de Microsoft – et Warren Buffett – l’homme le plus riche d’Amérique –, 40 milliardaires américains ont décidé de se délester d’une partie de leur fortune pour répandre le bien autour d’eux. Lancée à la mi-juin, les noms apposés sur le site « The Giving Pledge » (« Promesse de don ») forment un tableau de famille des puissants. Parmi ce panel de généreux nantis, on compte en effet le réalisateur George Lucas, le fondateur de CNN Ted Turner, le maire de New York Michael Bloomberg, le cofondateur d’Oracle Larry Ellisson. Même T. Boone Pickens, le patron du fonds spéculatif BP Capital Management, pourtant ébranlé par la marée noire, promet son obole.
Dans un communiqué, les nababs expliquent la raison du pourquoi : « Aussi loin que remontent mes souvenirs, j’ai toujours su que ma raison d’être était d’aider les gens », confient – d’une même voix – Jon et Karen Huntsman, enrichis grâce à leur société de chimie. « J’ai eu l’avantage d’avoir de bons gènes et une bonne éducation. En regardant autour de moi les gens qui n’avaient pas ces avantages, il m’est apparu clair que j’avais une obligation morale de me servir de mes ressources pour rétablir l’équilibre », explique George Kaiser, pédégé de la société financier BOK Financial Corporation.
Des belles paroles, certes. Mais combien de billets verts pour les malheureux de ce monde ? Le site refuse de livrer des chiffres. « Chaque famille décidera de son côté. Cette promesse demande aux signataires de s’engager à donner la majorité de leur fortune. Beaucoup ont déjà dépassé ce taux et continueront à le faire. » Car il ne s’agit pas d’un fonds destiné à remplir les caisses d’ONG données. Non, simplement la promesse solennelle pour les signataires de donner au cours de leur vie ou après leur mort au moins 50% de leur fortune pour défendre les causes de leur choix.
D’accord, mais ça fait combien finalement ? Si on en croit le magazine Forbes, 35 des 40 signataires – sauf 3 non répertoriés et deux mystérieux donateurs – rassemblent à eux seuls près de 235 milliards de dollars (178 milliards d’euros). S’ils en donnent tous au cours de leur vie la moitié, nous voilà avec 117,5 milliards de dollars sur la table (89 milliards d’euros). On est loin de la broutille. Mais que peut-on faire avec une somme pareille ? Sauver la planète ? En 2006, Nicholas Stern, économiste britannique, avait évalué le prix de l’action nécessaire pour limiter le changement climatique à 1% du PIB soit 723 milliards de dollars par an. Avant de remonter, quelques temps plus tard, ce taux à 2%, soit 1446 milliards de dollars. Avec leur 117,5 milliards, nos riches n’empêcheront pas le climat de s’emballer – d’autant qu’ils ne renouvelleront pas leurs dons chaque année - mais pourrait soulager la Terre ça et là.
En revanche, ils pourraient presque permettre aux pays de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques) de tenir dès l’an prochain leurs promesses en matière d’aide au développement. Aujourd’hui, ceux-ci y consacrent 0,31% annuellement ou 119,6 milliards de dollars (90,9 milliards d’euros) selon le dernier rapport de l’OCDE. Pour parvenir aux 0,7% promis, il manque aux pays riches 150 milliards. Une somme qui correspond presque au pactole de nos 40 milliardaires.
Mais mieux encore, nos milliardaires ne comptent pas s’arrêter là. « Nous ne faisons que commencer », a précisé Warren Buffett. Pas pingre, le milliardaire a lui carrément expliqué qu’il verserait 99% de sa fortune, estimé par Forbes à 40 milliards de dollars (30,4 milliards d’euros). Avec seulement 400 millions de dollars, il sera alors sans doute expulsé manu militari du club des milliardaires vers celui des millionnaires. Dur !