Naomi Klein (Lire notre interview ici) est énervante, elle vise juste chaque fois ! Après No logo (Actes Sud, 2001), considéré comme la bible de l’altermondialisme, la journaliste canadienne revient avec un ouvrage complet, très documenté et salutaire. Dans Tout peut changer, elle articule la dénonciation du système capitaliste, les luttes contre les changements climatiques et un concentré d’espoir lucide. Le changement climatique n’est pas qu’une affaire de CO2, c’est une affaire de gros sous. En s’appuyant sur une énergie abondante et peu chère, sur une main-d’oeuvre à très bas coût partout dans le monde, le système capitaliste s’est repu des ressources naturelles et a déséquilibré notre machine climatique. Le tout avec notre assentiment. Ce n’est pas un scoop, mais ça va mieux en le (re)disant. Mais là où d’aucuns pourraient y voir matière à désespérer, Klein y voit un catalyseur. Le changement climatique peut être le réveil civilisationnel dont nous avons besoin pour nous secouer, un message puissant délivré à coups d’inondations, de tempêtes ou de sécheresses. S’y confronter, ce n’est pas seulement picorer bio, trier ses déchets et se déplacer à vélo, c’est aussi se rassembler pour changer le monde, avant que celui-ci ne change si drastiquement qu’il n’y aura plus personne à sauver. Celle qui vient des mouvements altermondialistes dévide sa pelote militante : c’est le moment ou jamais de faire converger les luttes. Entre le moment où Naomi Klein débuta l’écriture du livre et aujourd’hui, cinq années se sont écoulées. C’est le temps qu’il aura fallu pour que pousse, partout dans le monde, un territoire virtuel nommé Blocadie, dans lequel les gens s’opposent aux bulldozers, aux aéroports, aux mines d’extraction, aux puits de gaz, aux barrages… Ils s’opposent et proposent des alternatives pour une société plus juste, plus humaine, plus équitable. Voilà pourquoi il ne faut rien attendre de la COP21 qui se déroulera à Paris en fin d’année mais qu’il faut s’en servir comme d’un tremplin pour se mobiliser et exiger, depuis la base, un changement radical.
Une guerre contre la vie
Seuls des mouvements sociaux d’envergure pourront sauver l’humanité, estime l’auteure. L’urgence est d’autant plus prégnante que le système capitaliste mène tout simplement une guerre contre la vie. Dans cet ouvrage, Klein juxtapose discrètement son combat personnel contre l’infertilité avec la crise de fertilité que traversent les écosystèmes : en examinant les effets du dérèglement climatique sur la capacité de reproduction de plusieurs espèces, elle conclut : « Le résultat n’est pas un amoncellement de cadavres, juste un grand vide. »
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