« Aider les gens à passer de l’obscurité à la lumière. » La devise de Solar Electric Light Fund (Self) n’a rien de biblique : cette organisation basée à Washington s’appuie sur l’énergie solaire pour éclairer les coins les plus reculés de la planète. « Il ne faut pas seulement rendre l’énergie accessible aux gens, il faut que cette énergie soit propre, durable et non émettrice de CO2 », insiste son directeur, Robert Freling. C’est dans un village chinois, au milieu des années 1990, que ce polyglotte a été happé par l’action de Self. « J’y ai passé deux mois et j’ai pu observer l’émerveillement des gens lorsqu’ils découvraient pour la première fois la lumière électrique, raconte-t-il avec ferveur. Cela m’a convaincu. »
Kérosène et bougies au placard
Depuis, ce natif de Dallas et ses équipes ont essaimé leurs panneaux solaires dans pas moins de 20 pays. Leur objectif : faire entrer la fée électricité dans les foyers de 2 milliards d’individus vivant en situation de pauvreté énergétique, « ce qui signifie qu’ils n’ont jamais été connectés à un réseau électrique ». Lorsqu’il donne des conférences devant ses concitoyens, Robert Freling aime rappeler ce que serait leur vie sans électricité : « Plus de lumière la nuit ni de radio ou de télévision, plus de téléphone portable ni d’ordinateur… » Cette perspective, difficile à imaginer, est pourtant le lot commun d’un tiers de l’humanité aujourd’hui.Créée en 1990, Self démarre en Asie puis gagne rapidement l’Afrique, un continent baigné de soleil, situation idéale pour la production d’énergie photovoltaïque. L’idée est d’installer des panneaux solaires capables de subvenir aux besoins d’un foyer, le tout financé par le microcrédit. Le coût d’une installation – environ 400 euros – est remboursé en trois ou quatre ans. Cette somme équivaut bien souvent au montant dépensé par ces communautés isolées en kérosène, bougies ou piles. « En échange, ils obtiennent une technologie plus propre et surtout moins dangereuse », souligne Robert Freling.
Au fil des ans, les projets se succèdent et prennent de l’ampleur. Le quadra globe-trotter s’attelle vite à éclairer des écoles, des hôpitaux et des villages entiers. « Au final, l’électricité n’a de valeur que par rapport aux services qu’elle permet de mettre en ?uvre : rendre l’eau potable, réfrigérer les vaccins, faire marcher les ordinateurs… », note Robert Freling, qui a conclu des partenariats avec de nombreuses ONG, comme Partners In Health, pour alimenter des cliniques au Rwanda.
Le succès du Bénin
Mais le système d’irrigation goutte-à-goutte mis en place au Bénin est probablement le projet dont Robert Freling est le plus fier. L’installation est alimentée par une pompe à eau solaire qui distribue le précieux liquide et permet à près de 100 000 personnes de consommer, et même de vendre, une récolte habituellement inexistante en période sèche. « Le but est de former les gens puis de les laisser gérer le système de façon autonome et si possible qu’ils en vivent. » Face au succès, le directeur de Self s’enthousiasme : « Et pourquoi pas prouver au monde qu’un pays comme le Bénin peut fonctionner exclusivement grâce à l’énergie solaire ? »
Au final, l’impact de Self, dont les projets sont financés par des institutions gouvernementales, des fondations et de plus en plus, par des dons de particuliers, peut paraître à la fois énorme et dérisoire. Plus d’un million de personnes bénéficient directement ou indirectement de l’électricité produite par ses panneaux solaires, mais des millions d’autres attendent toujours. « Nous sommes sollicités quotidiennement », admet Robert Freling qui avoue devoir refuser la majorité des demandes faute de moyens.
A Self, on rejette catégoriquement le qualificatif de « charitable ». Pour le directeur, l’action de l’organisation dépasse la philanthropie : « Si l’on ignore les causes de la pauvreté et du désespoir qui sévissent dans les endroits défavorisés du monde, on ne mettra jamais un terme au terrorisme, qui se nourrit des inégalités et des injustices. » D’ailleurs, Self effectue des évaluations d’installations à la frontière jordano-irakienne, en Afghanistan ou encore au Pakistan. « En favorisant un développement à la fois propre et durable, nous contribuons à améliorer la stabilité du monde. »
L’impact des SELF services
Coût moyen d’une installation solaire pour une clinique : 35 000 euros.
100 000 installations fonctionnent actuellement de par le monde.
Les retombées des projets touchent plus d’un million de personnes.
Sur vingt ans, 500 000 tonnes de CO2 ont été évitées par rapport à ce qu’auraient émis les lanternes au kérosène.
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