Il s’agit de « la plus grande histoire du monde » et pourtant « le journalisme n’a jamais réussi à la raconter ». A la veille de son départ du Guardian, après vingt ans à la tête de la rédaction, Alan Rusbridger se repent. Dans un mail envoyé à ses équipes en décembre, puis dans une lettre ouverte à ses lecteurs, le rédacteur en chef du quotidien britannique exprime son seul regret : ne pas avoir pas traité « l’immense, imposante, écrasante question » du changement climatique comme elle le méritait. Ce bouleversement, trop lent ou pas assez visible « pour le tic-tac impatient des rédactions », « a rarement fait les gros titres », reconnaît celui qui, cet été, cèdera sa place à Katherine Vinger, la première femme à ce poste depuis la naissance du journal il y a cent quatre-vingt-quatorze ans.
Il n’est jamais trop tard. A quelques mois de la COP21, la conférence sur le climat qui se tiendra à Paris en décembre prochain, le Guardian s’est donné pour mission de raconter cette « grande histoire ». Oui, mais comment ? Au début du mois de mars, le journal de référence – et son site, le quatrième anglophone le plus consulté au monde – a lancé une grande campagne contre les causes du changement climatique. Sa cible ? Les énergies fossiles. Son mot d’ordre ? « Keep it in the ground » : « laissez-les sous terre ». Sa stratégie ? pousser les investisseurs, banques, fondations et universités à se détourner des 200 principales entreprises qui les produisent. En s’alliant avec l’ONG 350.org, spécialiste des campagnes de désinvestissement, en adoptant la méthode du « name and shame », le Guardian ajoute aux grandes enquêtes dont il est coutumier, des appels à la mobilisation. La première pétition vise principalement la fondation Bill et Melinda Gates, qui finance les pages « Global développement » du Guardian, mais également à l’origine de 1,4 milliard de dollars ( 1,3 milliard d’euros) d’investissement dans les énergies fossiles et la Wellcome Trust, une fondation de charité en médecine connue pour avoir par le passé coupé ses investissements à l’industrie du tabac.
Malgré 100 000 signatures déjà récoltées par la pétition du Guardian, la Wellcome Trust a refusé d’engager une nouvelle politique massive de désinvestissement. Déterminés, les journalistes du quotidien poursuivent l’offensive. Dans un nouvel article, ils soulignent que la fondation prompte à alerter sur le défi que représente le changement climatique, n’investit que 0,9% de ses 3,5 milliards de livres (4,7 milliards d’euros) de fortune dans cette direction. Les passes d’armes ne font que commencer.
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