Le 17 juin, le sénateur Dupont rendait son rapport sur la publicité. Un rapport que les associations jugent bien trop frileux. Problème : le gouvernement promet de s’en inspirer pour fixer les lignes de la nouvelle réglementation sur la publicité qui devrait intégrer le second volet du Grenelle sur l’environnement. Le point avec Nicolas Hervé.
Quelles sont pour vous les limites du rapport d’Ambroise Dupont ?
Aujourd’hui, les municipalités et le préfet sont conjointement chargés de faire respecter la loi sur l’affichage. Or, le sénateur Dupont veut supprimer l’échelon préfectoral. Certes, la municipalité a un rôle à jouer. Grâce à ses règlements locaux de publicité, elle peut notamment imposer des politiques plus restrictives que la réglementation nationale ou au contraire plus laxistes. Le problème c’est qu’il y a un lien étroit entre les élus et les afficheurs de leurs communes. Le maire est juge et partie. Aujourd’hui quand le maire subit trop de pression, le préfet peut dire : "ça suffit, c’est illégal" et trancher. Ce ne sera plus possible si le préfet n’a plus de pouvoir en la matière. En fait, si le ministère veut faire sauter l’échelon étatique, c’est parce qu’il ne veut pas investir plus de moyens. En 2007, il y avait, par département, une seule personne employée à mi-temps pour faire respecter la loi sur la publicité. Et c’est une moyenne ! Dans certains départements, il n’avait personne du tout ! Enfin, le rapport ne s’attaque pas aux questions fondamentales de taille d’affichage et de densité de panneaux. Sur la densité, il dit simplement qu’il faut en parler. Et sur la taille il propose de réduire les affiches de 16 à 12 m2. Or, c’est déjà ce qui est en vigueur aujourd’hui...Que proposez vous ?
Évidemment, la liberté d’expression ne doit pas être remise en cause mais nous estimons qu’elle doit être contrebalancée par une liberté de réception. Il faut que chacun puisse avoir le choix de recevoir les messages diffusés. C’est vrai dans tous les autres médias. On a le choix d’allumer la télé ou pas, de choisir les journaux qu’on lit et la radio qu’on écoute. Mais dans la rue le message est imposé. Nous demandons la réduction de la taille des affiches pour qu’il y ait un consentement implicite. Il faut qu’une personne fasse le choix de s’approcher si elle veut lire le message publicitaire. Nous demandons ainsi que les dispositifs d’affichage soient limité à 2 m2 avec des affiches de 50 sur 70 centimètres. C’est déjà la taille imposée aux messages politiques ou associatifs sur les panneaux d’affichage des mairies par exemple. En quoi l’expression commerciale aurait-elle plus de choses à dire que le message politique ou associatif ? Enfin, nous refusons l’utilisation d’énergie pour les panneaux d’affichage. D’abord parce que c’est aberrant écologiquement. Et parce que, en attirant le regard par l’éclairage, le mouvement ou carrément des écrans plasmas, ces panneaux-là nient la liberté de chacun de recevoir le message ou pas.Que va-t-il se passer à présent ?
En théorie, parallèlement au rapport Dupont, un rapport ministériel doit reprendre les conclusions des ateliers menés dans le cadres du Conseil national du Paysage auquel nous avons participé. [L’atelier "Publicité et entrées de villes" a réuni associations, publicitaires et gouvernement pour étudier l’impact sur le paysage de la publicité et envisager des réformes, Ndlr.] Mais on attend encore que ce rapport soit publié. Ensuite, celui-cl doit en principe être examiné par le Conseil du Paysage. Ça sera alors au ministère doit faire des choix. Le problème c’est que celui-ci a déjà commencé à communiquer sur ses orientations. Le principe de la concertation a été bafoué. Nous, nous demandons un débat public sur la publicité. Pas seulement sur son impact sur le paysage mais aussi sur les questions de société qu’elle soulève. Mais aujourd’hui, les politiques refusent d’en discuter.
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