Près d’un logement sur trois se chauffe à l’électricité en France. Ce mode de chauffage s’est considérablement étendu en France depuis 1975. A l’époque, 20% des logements neufs optaient pour l’électrique, contre 80% aujourd’hui. Un choix clair et net, que la France est la seule à avoir fait. Selon une étude menée par l’association Alternative pour les énergies renouvelables et l’environnement (pour le compte de Greenpeace et à partir de données de 2005), les ménages français posséderaient à eux seuls autant d’appareils de chauffage électriques que l’ensemble des foyers européens réunis. Ailleurs la pratique est rare. Le Danemark l’a tout bonnement interdit tandis que la Belgique en a proscrit la publicité. Et pour cause, ce mode de chauffage a de graves inconvénients (voir encadré).
Comment expliquer cette spécificité française ? A Terra eco, notre petit doigt nous dit que c’est en bonne partie grâce au lobbying d’EDF qui [a montré sa capacité à défendre le chauffage électrique pendant le Grenelle mais aussi grâce à ses très nombreuses publicités. La preuve en image :
Tout commence en 1972, où en 46 secondes et avec une pub animée en noir et blanc, EDF avance que le « chauffage électrique intégré isole du bruit » et qu’avec lui « les plantes revivent, les balais balaient moins, les odeurs s’évanouissent, les enfants s’enrhument moins l’hiver, tout le monde est plus heureux ». Conclusion : « le chauffage électrique intégré recrée les conditions naturelles de la vie. » Une perle à visionner ci-dessous.
En 1986, en couleur cette fois, EDF fait rouler un petit garçon sur une musique jazzy dans un appartement pour vanter son système « bien-être ». La pub loue notamment la bonne régulation et le confort du système, sans cette fois citer le terme « chauffage électrique ». Les références aux watts sont plus subtiles : la maison a la forme d’une prise électrique, et le spot se termine sur le très subtil jeu de mot « soyez courant » :
En 1991, retour au dessin. Une femme à la voix lascive vante les mérites de son « chauffage électrique » qui « a déjà tout chauffé avant de (la) voir arriver ». Elle prend même son chauffage, représenté par un homme chauve en toge, dans les bras. Là encore, tout se passe comme si c’était grâce à l’énergie électrique que l’on peut se chauffer intelligemment et avec un thermostat :
En 1992, retour du même couple, et de la même stratégie. La femme EDF célèbre à nouveau les mérites de la programmation de la chaleur : « Mon chauffage électrique, je règle son thermostat une fois pour toute et après on ne voit plus le temps passer » :
En 2000, changement de tactique. Le système vendu et vanté s’appelle désormais Vivrelec. La publicité annonce une « révolution » dans le chauffage électrique. A l’époque, EDF va jusqu’à verser une prime aux acquéreurs d’un logement neuf qui se chauffent à l’électrique. Une prime qui durera jusqu’en 2004.
En 2001, nouvelle publicité pour Vivrelec, qui flatte les vertus de l’électrique, mais sans le nommer. Peu de nouveauté dans cette pub, mais on ne résiste pas à regarder cet homme qui n’arrive pas à quitter sa maison tant il aime « ses serviettes toujours tièdes ».
En 2004 , encore une pub pour Vivrelec. Cette fois, elle montre une famille dont les enfants tristes sont contraints d’ouvrir leurs cadeaux de Noël dans la neige. Et leur propose de rénover leur chauffage électrique via un numéro azur. No comment.
Un choix doublement dommageable
La France a battu mardi un nouveau record de consommation d’électricité. Le principal responsable de ces pics de consommation est le chauffage électrique. Ce ne sont pas les anti-nucléaires qui le disent mais RTE, Réseau de transport d’électricité, la filiale d’EDF chargée de veiller à l’équilibre entre consommation et production. Dans son rapport annuel 2011, elle indique : « L’usage du chauffage électrique augmente la sensibilité de la consommation aux températures froides. Cette sensibilité à la température de la consommation d’électricité est aujourd’hui de 2 300 MW par degré à 19h, heure de la pointe de consommation journalière en hiver. Elle n’a cessé de progresser ces dix dernières années, gagnant près de 70 MW par an. » Résultat, en hiver, un degré de moins entraîne une augmentation de la consommation équivalent à deux fois celle de la ville de Marseille.Deuxième problème de cette production : elle entraîne beaucoup de pertes. En effet, le circuit de production de chaleur via l’électricité, principalement nucléaire, est plein d’embûches. Il faut d’abord que la centrale produise de la chaleur qui va être transformée en électricité. Mais cette électricité doit à nouveau être transformée via votre chauffage avant de vous réchauffer les mimines. Résultat : plus de 72% de l’énergie est perdue dans ce circuit. Un manque d’efficacité qui valent aux convecteurs électriques le surnom moqueur de « grille-pain ».
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