Nicolas Hulot est sorti de l’Elysée ce jeudi matin avec une nouvelle casquette. Le voilà désormais « envoyé spécial du président de la République pour la protection de la planète ». Un titre honorifique pour une mission bénévole et « apolitique » qui consistera à « porter la voix de la France auprès d’un certain nombre de pays, du monde associatif pour faire émerger des solutions et accélérer la mise en œuvre de la transition énergétique », explique-t-on à la Fondation Nicolas Hulot pour la nature et l’homme dont l’ancien animateur restera président. « Ce qui compte, c’est de mettre toute mon énergie au service de la préservation de la planète. Cette mission est une opportunité pour engager une nouvelle dynamique en faveur de la cause universelle que sont les enjeux écologiques et climatiques, en portant nos convictions auprès des instances et des décideurs internationaux », a déclaré l’intéressé dans un communiqué qui s’est aussi fendu d’une interview vidéo :
« La mission qui m’est confiée c’est d’essayer d’aller sensibiliser, mobiliser, convaincre des acteurs politiques, économiques, des sociétés civiles qu’ils ne sont peut-être pas aussi sensibilisés que nous le sommes ou qui le sont différemment, de créer des alliances sur ces sujets ou sur ces enjeux qui sont des enjeux universels et des enjeux du long terme face auxquels la France toute seule quoi qu’elle fasse ou qu’elle ne fasse pas ne pourra pas résoudre unilatéralement », explique-t-il dans la vidéo. Vous y voyez plus clair ?
Face à cette annonce, quelques écolos politiques ont manifesté leur enthousiasme :
+1 "@c_rossignol : Bonne nouvelle ! Nicolas #Hulot nommé par Hollande ’’envoyé spécial pour protection de la planète’’ lefigaro.fr/flash-actu/201…"
— Eric Loiselet (@Loiselet) Décembre 6, 2012
Excellente nouvelle. Un signal fort pour la transition écologique “@europe1 Planète : Hulot "envoyé spécial" de Hollandeeur1.fr/eABRodw
— Denis_Baupin (@Denis_Baupin) Décembre 6, 2012
Pour d’autres, l’interrogation est de mise. Que va vraiment faire Nicolas Hulot ? Et François Hollande est-il en train de s’acheter une conscience verte ? Il faut dire que sur le tableau de l’environnement, le parcours du Président socialiste est pour le moins chaotique. Retour chronologique sur les hauts et les bas de François Hollande en la matière.
Mai 2011 : Lorsque Terra eco l’avait rencontré en mai 2011 alors qu’il était candidat à la primaire socialiste, il affichait une sensibilité forte aux questions écologiques :
« Nous passons d’un monde à un autre : le monde des énergies inépuisables, le monde d’un nucléaire peu coûteux, le monde d’un consommation des matières premières qui est forte au Nord et qui est réduite au Sud. Ce monde-là est terminé ou en voie de l’être. Donc il faut passer à un autre monde. » Il comptait donner au ministre du Développement durable une place de choix : il faut « une architecture gouvernementale qui fasse de ce numéro 2 chargé du développement durable un ministre au large champ : celui de l’énergie, des transports, du logement, des grandes infrastructures et capable d’avoir prise sur les questions fiscales. » Il annonçait aussi le débat sur la transition énergétique : « Au lendemain de l’élection présidentielle et des élections législatives qui suivront, il faut ouvrir un grand débat que j’appellerais de la démocratie écologie qui devra être sur l’énergie et les grandes infrastructures de transport. Je crois que nous avons besoin de cette concertation. »
Mai 2012 Le gouvernement de Jean-Marc Ayrault est nommé. Comme promis, l’énergie vient dans le périmètre du ministère du Développement durable mais pas le logement. Nicole Bricq, sénatrice inconnue du grand public, est choisie pour ce poste, c’est une surprise. Mais elle n’est pas ministre d’Etat et encore moins n°2 du gouvernement : son ministère se trouve au neuvième rang protocolaire. Le jour de son entrée en fonction, la nouvelle ministre glisse : « Toutes les fonctions que j’ai exercées, j’ai toujours considéré que j’étais de passage, ça va ça vient, la politique. » Les écologistes, dont l’avocat Arnaud Gossement, y voit « un nouvel espoir pour l’écologie ».
Juin 2012 : Le 13 juin, Nicole Bricq, la ministre de l’Ecologie nouvellement nommée annonce une suspension des forages pétroliers en Guyane. S’est-elle trop avancée ? Coïncidence ou pas, une semaine plus tard, elle est remerciée. Le portefeuille de l’écologie revient désormais à Delphine Batho, éphémère ministre de la Justice et inconnue du milieu écolo, qui n’est pas non plus ni ministre d’Etat ni n°2 du gouvernement. Et les forages continuent.
29 août : Delphine Batho assure que le nucléaire est une énergie « dont nous continuerons d’avoir durablement besoin ». Quelques jours plus tôt, Arnaud Montebourg, ministre du Redressement productif avait affirmé sur BFM TV que le nucléaire est « une filière d’avenir » tout en reconnaissant qu’il fallait qu’il soit « équilibré ».
Septembre 2012 : Le discours d’ouverture de la conférence environnementale, donné par François Hollande, séduit. Il s’engage notamment sur les gaz de schiste, en affirmant : « Dans l’état actuel de nos connaissances, personne ne peut affirmer que l’exploitation des gaz et huiles de schiste par fracturation hydraulique, seule technique aujourd’hui connue, est exempte de risques lourds pour la santé et l’environnement. » Le reste des discussions, comme le discours de clôture de Jean-Marc Ayrault, déçoivent les écologistes, alliés du gouvernement, et les associations. Les attentes sont reportées sur le débat sur la transition, qui tarde à démarrer et connaît quelques ratés.
13 novembre 2012 : François Hollande entrouvre à nouveau la porte à l’exploitation des gaz de schiste en France. A un journaliste insistant, qui lui rappelle que seule l’exploitation des gaz de schiste par fracturation hydraulique est actuellement interdite et que rien n’est précisé pour les techniques alternatives émergentes, il se contente de répondre : « La recherche est possible sur d’autres techniques que celle de la fracturation hydraulique. Pour l’instant, cette recherche n’a pas abouti, je ne peux pas l’interdire, elle n’est pas interdite pas la loi (...) Je laisse les entreprises et les chercheurs y travailler et je prendrai mes responsabilités le moment venu. »
28 novembre 2012 : Arnaud Montebourg, toujours, rouvre la porte aux gaz de schiste. « Nous n’acceptons pas la fracturation hydraulique mais nous travaillons à imaginer une nouvelle génération de technologies propres qui permettraient d’extraire sans abîmer. »
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