Les Réseaux Intelligents |
Par Bastien Olivennes |
26-02-2018
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Les enjeux du stockage de l’électricité pour les collectivités |
Les atouts du stockage énergétique pour les collectivités
La part croissante des énergies renouvelables dans le mix électrique en France nécessite un développement corrélatif des solutions de stockage adaptées. Selon une étude publiée en 2017 par le cabinet Clean Horizon, un taux de pénétration hypothétique de 40% des énergies renouvelables d’ici 2030, imposerait en parallèle des capacités de stockage évaluées à plus de 100 GW. Une proportion considérable au regard des capacités actuelles mais qu’il faudra pourtant garantir pour pallier l’intermittence de la production solaire et éolienne, et démocratiser les nouveaux usages de l’électricité (voiture électrique, objets connectés, etc.).
Quelle que soit la technologie utilisée, les solutions de stockage permettent en effet de faciliter la gestion des flexibilités dans les systèmes électriques, et donc l’intégration du solaire et de l’éolien, variables par nature. Il est possible par exemple de stocker l’énergie en période d’excédent de production et de la réintroduire sur le réseau lors des pics de consommation, tout en assurant un certain niveau de tension en tout point du réseau, condition essentielle à une énergie de qualité pour les consommateurs finaux.
A l’échelle locale, les communes cherchent aujourd’hui à renforcer leur action en matière d’efficacité énergétique (développement de l’éclairage public à faible consommation par exemple) et à mettre en place des systèmes de production locale d’énergie via la pose de panneaux solaires sur les toits des édifices ou la production d’électricité à partir des déchets. Les systèmes de stockage d’énergie décentralisés, de petite et moyenne taille, offrent une flexibilité opérationnelle beaucoup plus grande que les systèmes énergétiques actuels, et assurent un approvisionnement énergétique fiable pour les bâtiments et les quartiers. Problème, si de nombreuses technologies sont désormais matures, le stockage de l’électricité n’est pas encore démocratisé et une évaluation du potentiel et de la viabilité économique de ces différents services est à l’étude afin de faire émerger des « business models ».
Dans cette optique, organismes gouvernementaux, énergéticiens et collectivités locales ont lancé ces dernières années de nombreux projets et démonstrateurs, dans le but de tester de nouvelles alternatives de stockage d’énergie de proximité adaptées aux différents contextes locaux d’application, et de couvrir des services divers tels que l’atténuation de la congestion du réseau, l’équilibrage local du réseau, le soutien de la tension et la régulation. Les différents exemples détaillés ci-dessous dénotent de cette diversité de solutions en matière de stockage de l’énergie, et de la possibilité pour les territoires de disposer de la bonne énergie, au bon endroit, et au bon moment, tout en limitant leurs impacts sur l’environnement.
A côté des batteries, les Stations de transfert d’énergie par pompage (dites STEP) sont les moyens de stockage les plus développés au monde à l’heure actuelle. Elles sont constituées de deux bassins hydrauliques à des altitudes différentes permettant un stockage infra-hebdomadaire. Une technologie efficiente mais dont le développement se heurte bien souvent à des contraintes géographiques et nécessite des investissements considérables pour optimiser les installations existantes ou reconvertir certains barrages hydroélectriques en station. Cela étant, l’idée de « micro-Step urbaines », défendue par l’entrepreneur Denis Payre via sa société Nature & People First commence à faire son chemin chez les collectivités et entreprises, et pourrait être expérimentée prochainement dans le cadre d’un projet hôtelier à La Réunion. « L’idée est de profiter d’une construction ou d’une réhabilitation pour placer un réservoir dans les fondations, sous un parking, une route ou un terrain de sport. Il faut être proche du lieu de consommation, souple, sans consommer de foncier et impacter l’écosystème », explique au journal Les Echos Denis Payre.
Autre exemple de moyen de stockage prometteur à Brest, où Dalkia, sous la marque ombrelle d’EDF Solutions Energétiques, a implanté un système de stockage thermique sur le parcours d’un réseau de chaleur alimenté par une unité de valorisation énergétique des déchets (UVED) et une nouvelle chaufferie biomasse. Baptisée par les Brestois « Miroir des énergies », cette tour de stockage propose une capacité de 1000 m3 et représente 2500 MWh/an d’énergie renouvelable supplémentaire valorisée. D’un point de vue technique, un accumulateur stocke de l’eau chaude pour optimiser l’efficacité opérationnelle lorsque la consommation de chaleur des utilisateurs est inférieure à la production, et la restitue lors des pics de demande de chaleur. Selon la taille du stockage, la réserve d’énergie peut servir à alimenter les clients sur une durée de quelques heures à plusieurs jours. Encore peu développé, le stockage thermique présente pourtant un potentiel considérable, en particulier à l’échelle des quartiers et dans le cadre des réseaux de chaleur.
Enfin, le stockage « power-to-gas » exploite le surplus d’énergie électrique pour alimenter un électrolyseur qui décompose l’eau en dioxygène et en dihydrogène (H2). Il peut également réagir avec du dioxyde de carbone pour former du méthane. Pour l’heure, la technique est encore au stade de la recherche et développement, et plusieurs pistes sont en cours d’expérimentation. La start-up Sylfen par exemple, récompensée par un Prix EDF Pulse en 2016, développe une solution intégrée de stockage et de production d’énergie, à destination des bâtiments et éco-quartiers. Baptisé « Smart energy hub », il s’agit ici d’un électrolyseur haute température (700 à 800°C) totalement réversible, déclinable dans des versions de quelques dizaines à plusieurs centaines de kilowatts.