C’est la rentrée, d’accord. Mais l’heure est encore aux apéros en plein air. Et pour conserver un air de vacances, quoi de mieux que des chips ? Vendues essentiellement l’été, elles font d’autant plus recette qu’il fait beau. Mais est-ce aussi le beau fixe côté environnemental ?
En 2006, PepsiCo – le n° 1 mondial de la chips grâce à la marque Lay’s – a demandé au Carbon Trust d’examiner l’empreinte écologique d’un paquet de Walkers, son produit anglais. L’organisme indépendant créé par le gouvernement britannique dresse alors le bilan carbone des « Cheese & Onion », la saveur la plus populaire outre-Manche. Bilan : 75 g de CO2 sur la balance pour un petit sachet de 34 g. Plus de deux fois son poids ! On y apprend surtout que 22 % de l’impact du paquet provient des seules patates. Gourmande en fertilisants, la culture de pommes de terre produit du protoxyde d’azote, plus connu sous le nom de gaz hilarant. Mais rien de tordant dans l’histoire. Le protoxyde d’azote, N2O pour les blouses blanches, est un puissant gaz à effet de serre. Son potentiel de réchauffement global est 310 fois supérieur à celui du CO2, selon le Giec, le Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat. Le problème serait pourtant en partie résolu par l’utilisation de pommes de terre cultivées biologiquement. Las, pas de chips bio chez Lay’s, ni chez Vico, les deux plus gros vendeurs en France (lire ci-dessous).
L’huile n’obtient pas la palme
Les orangs-outans goûtent peu les chips. Et pour cause. Elles contiennent l’inévitable et redoutable huile de palme (lire aussi Terra eco n° 13, avril 2010). Peu onéreuse grâce au très haut rendement de la culture des palmiers, cette huile végétale fait recette auprès de l’industrie agroalimentaire. Près de 22 millions de tonnes sont aujourd’hui consommées chaque année dans le monde. L’ennui, c’est qu’elle fait tache (d’huile). Car la culture de palmiers cumule les tares. En Indonésie et en Malaisie, les principaux pays producteurs, elle a le mauvais goût de participer à la déforestation, menaçant ainsi l’habitat naturel de nos amis les singes. Sans parler des acides gras saturés dont elle regorge, et que vos artères « apprécient » tant.
Forcés de montrer patte verte, les industriels de la chips font marche arrière. « Au vu des bénéfices environnementaux et sanitaires, PepsiCo a totalement cessé son utilisation dans ses chips dès 2006 aux Etats-Unis et depuis 2007 en France », indique Jean-Raphaël Hétier, directeur logistique et développement durable de la multinationale dans l’Hexagone. Chez Vico, « 40 % des chips en marque propre sont désormais cuisinées à l’huile de tournesol » assure Robert Torck, pédégé d’Intersnack France qui commercialise la marque. Et promis, dès 2011, ce seront tous les paquets. Mais quid des marques de distributeurs qui représentent environ la moitié du marché ? Au vu de la polémique entourant l’huile de palme, ils recherchent désormais sa consœur labellisée durable. Mais cette certification, mise en place par des industriels avec le WWF en 2004, ne concerne aujourd’hui que 4 % des volumes d’huile de palme échangés. De plus, elle autorise l’utilisation de certains pesticides et le défrichage des forêts secondaires.
Dernière plaie des chips : l’emballage. Composé de plastique et d’une fine couche d’aluminium, le paquet ne se recycle pas. A quelques initiatives près. Ainsi, en Angleterre, Sainsbury’s et Tesco, les deux plus grands distributeurs du pays ont mis en place, en début d’année, un système de récupération. Les paquets de « crisps » vides prennent le bateau pour les Philippines dans des containers inutilisés. Sur place, ils servent à fabriquer de jolis sacs à reflets métalliques. Mais rien de tout cela chez nous. « La fabrication de l’emballage ne représente finalement que 15 % du bilan carbone du paquet et son élimination 2 %. Ce n’est donc pas un enjeu majeur, assure Jean-Raphaël Hétier de PepsiCo. C’est en revanche l’un des plus symboliques. En Angleterre, nous avons des paquets avec 40 % de papier labellisé FSC ; ici, des caisses en carton recyclé. Et nous travaillons à trouver d’autres solutions. »
Les industriels s’emballent
Vico s’est également lancé dans la course à l’emballage écolo. « Nous avons mis en place un programme de recherche sur une pellicule biodégradable. Mais compte tenu des coûts de développement importants que cela représente, il n’est pas encore très avancé », concède Robert Torck. Pendant ce temps, les industriels, un brin schizophrènes, s’emballent pour les petits formats de 60 g ou 150 g et pour les « multipacks ». Et hop, deux fois plus d’emballage ! Si la tendance au grignotage est moins forte qu’outre-Manche où 2,1 kg de snacks salés sont avalés chaque année par tête de pipe, les Français en ingurgitent tout de même chacun 600 g par an. De quoi en avoir gros sur la patate. —
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