Au tournant des années 1960, la Bretagne a fait le pari de l’agriculture intensive. Très gourmand en énergie et en matières premières importées, nocif pour l’environnement, le modèle agroalimentaire breton est à bout de souffle. En cherchant à le préserver, les « bonnets rouges » font fausse route. Comparé à la France, la Bretagne c’est en effet :
1) Presque la moitié du soja importé
C’est la quantité de tonnes de soja importées en Bretagne chaque année pour nourrir les animaux d’élevage, soit presque la moitié des importations françaises (environ 4,63 millions de tonnes par an) ! Voilà donc 3 millions d’hectares de terres cultivées en Amérique du Sud uniquement pour nourrir les animaux bretons. Au-delà de leurs coûts environnementaux, ces importations coûtent de plus en plus cher aux agriculteurs puisque le prix du tourteau de soja est en hausse continue, il coûte presque trois fois plus aujourd’hui qu’en 2008, comme le montre le schéma ci-dessous (en dollars constants).
2) Deux fois plus d’énergie consommée
L’agriculture bretonne est aussi la championne de France de la consommation d’énergie. Selon un indicateur construit par le ministère de l’Environnement (la consommation régionale d’énergie par secteur rapportée au PIB régional tous secteurs confondus) l’agriculture bretonne en consomme plus de deux fois plus que la moyenne nationale (0,14 tonne équivalent pétrole/ million d’euros contre 0,06 en France). Or c’est justement le coût de l’énergie - qui ne cesse de grimper - qui fragilise l’agriculture française. La preuve, avec cette étude réalisée en 2012 par l’Ademe montrant que l’agriculture française consomme toujours plus d’énergie, que ce soit sous la forme d’électricité ou de fuel, ou encore sous la forme d’engrais et de nourriture importés. Le schéma ci-dessous, tiré de cette étude, montre que les budgets des agriculteurs s’en ressentent. Plus dépendante au niveau énergétique, la Bretagne est encore plus fragile, d’où les fermetures aujourd’hui.
3) Presque deux fois plus de nitrates
On trouve 40 mg de nitrates par litre dans les cours d’eau bretons. C’est presque 10 fois plus qu’en 1971 (5 mg) et presque deux fois plus que la moyenne française actuelle (23 mg). En produisant 58% des porcs français, la Bretagne – qui ne représente que 5% du territoire national - doit subir une pollution aux conséquences écologiques énormes. Et qui, elle aussi, a un coût : celui du traitement des eaux polluées ou du ramassage des algues vertes, ou encore des sanctions européennes qui menacent la France pour non-respect des directives environnementales.En Bretagne, ils font déjà autrement
On aurait pu poursuivre la liste. Rappeler qu’après 2700 contrôles menés en 2007, 500 exploitations bretonnes ont été jugées non conformes aux normes en matière de rejets azotés. Ou que les aides de la PAC (Politique agricole commune) y ont triplé entre 1993 et 2006, faisant de la région la quatrième la mieux dotée en France. Aides qui pourraient considérablement baisser si le verdissement de la PAC se poursuit. Ou encore que les libertés laissées à l’agro-industrie bretonne sont toujours plus grandes puisque le seuil à partir duquel l’extension d’une porcherie nécessite une autorisation administrative et une étude d’impact sur l’environnement a été relevé de 450 à 2000 bêtes en septembre. Mais on peut aussi montrer ceux qui font déjà autrement. C’est en Bretagne que le Cedapa (Centre d’étude pour un développement agricole plus autonome) a inventé à la fin des années 1970 une méthode agricole peu gourmande en intrants et en énergie et peu polluante. Une étude de l’Inra (Institut national de recherche agronomique) a montré que le lait produit ainsi est de meilleure qualité, et que les exploitations sont plus rentables. Le cahier des charges basé sur leurs expérimentations, appelé « système fourrager économe en intrants », est aujourd’hui reconnu à l’échelle européenne. Il été mis en place dans plus d’un millier d’exploitations, principalement dans l’Ouest de la France. Une révolution par la prairie.
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