195 pays et une grande absente : l’Union européenne (UE). Pourtant, son pavillon est bien là. Ses délégués assistent sagement aux réunions. Mais de leadership, point. « On attendait beaucoup de l’UE, qu’elle joue un rôle de passerelle entre les Etats sur des points délicats. En réalité, elle a beaucoup de mal à exister sur le plan diplomatique », expliquait à Terra eco Célia Gautier, du Réseau Action Climat en début de conférence.
« Le propre de l’UE, c’est de passer son temps à négocier avec elle-même. Elle tente de régler ses problèmes d’unanimité interne. Tant qu’il n’y a pas d’accord à 28, elle ne peut pas aller voir les autres pour leur dire quoi faire », décrypte Pierre Radanne, directeur de Facteur 4 et habitué des COP. Et l’expert de rappeler l’insuffisance de la copie rendue par l’Europe aux Nations unies : son INDC est « deux fois plus courte que celle du Liechtenstein. Elle promet une réduction de 40% de ses émissions, mais ne précise rien sur les modalités ». C’est parce qu’il faut une unanimité qu’elle est paralysée, « prise en otage » par la Pologne, aux positions peu ambitieuses en matière de climat. Mais ça en arrange bien quelques-uns. « L’Italie, l’Espagne, l’Autriche se cachent derrière la Pologne », poursuit Pierre Radanne.
Si l’Europe ne bouge guère, c’est aussi qu’elle est peu mise sous les projecteurs. « L’Europe est toujours dans une dynamique qui consiste à dire que le paquet énergie-climat (qui a un objectif de 40% de réduction d’émissions en 2030 notamment, ndlr) est tellement bon qu’elle n’a rien à négocier. Dans cette conférence, elle n’est pas un acteur moteur parce qu’elle considère qu’elle fait le boulot », estime, critique, Yannick Jadot, député européen Europe Ecologie - Les Verts. Et les autres se laissent convaincre. Aussi ne l’attaquent-ils guère. « A part les ONG, il n’y a personne pour perturber la paralysie de l’Europe. Il n’y a pas de pression extérieure pour faire bouger l’UE », poursuit-il. Pourtant, de l’avis de tous, elle pourrait faire bien mieux. Elle a d’ailleurs d’ores et déjà atteint la cible de 20% de réduction d’émissions qu’elle s’était fixé pour 2020. A peine le chef de la délégation chinoise, Xie Zhenhua, a-t-il insisté, lors d’une rencontre avec la délégation du parlement européen. « Il nous a dit qu’il estimait que l’UE pouvait faire beaucoup plus en matière d’objectifs », se souvient Yannick Jadot.
#COP21 delegation met today Xie Zhenhua head of Chinese delegation. Storify https://t.co/SCRTs0eeel #united4climate pic.twitter.com/73n1nubC4e
— ENVI Committee Press (@EP_Environment) 9 Décembre 2015
Pourtant, au-delà des objectifs qu’elle s’impose à elle-même, on aurait besoin de l’UE pour pousser l’ambition. Les ONG voudraient notamment qu’elle soutienne l’idée d’une révision à la hausse des INDC avant 2020, point très épineux. « Mais là-dessus, l’UE estime que, puisqu’elle a réussi à obtenir un accord autour du paquet énergie-climat pour 2030, il ne vaut pas mieux rediscuter ces objectifs », estime Yannick Jadot. Pourtant, il est urgent d’agir. Car les INDC sont insuffisantes et ne pas les revoir avant 2020, c’est aller droit vers la trajectoire des 3°C, craignent les ONG. Jeudi 9 décembre après-midi, dans la nouvelle version du texte toilettée par Laurent Fabius, l’idée d’un rendez-vous en 2018-2010 pour faire le point sur les engagements (et pourquoi pas les revoir à la hausse…) était conservée. Mais sans le soutien d’un acteur majeur des négociations, le restera-t-elle ?
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