L’essence est déjà trop chère. Mais demain, ce sera pire. Même les adeptes de la méthode Coué savent que la mesure adoptée par le gouvernement pour faire baisser les prix de l’essence (jusqu’à six centimes par litre pendant trois mois) ne va pas changer la donne. C’est écrit : à la crise économique va s’ajouter d’ici quelques années une crise énergétique majeure, liée à la raréfaction des énergies fossiles, dont le pétrole. La hausse des prix des carburants n’en est donc qu’à ses débuts.
Mais pas de panique, car une solution existe : laisser Titine au garage et enfourcher son vélo. Voilà LE remède anti-crise qui, en plus de faire gagner du pouvoir d’achat, affine les cuisses. C’est ce à quoi nous incite le Club des villes et territoires cyclables. Créé en 1989 par dix villes pionnières, ce club rassemble désormais 1300 collectivités territoriales. Pour diminuer le budget transport des ménages, son président, Jean-Marie Darmian, souhaite que le gouvernement s’inspire de deux de nos voisins européens : les Belges et les Britanniques.
Se mettre dans la roue de nos voisins
Les premiers ont mis en place le programme national Cycle to work (Au travail à vélo) qui consiste à inciter les employeurs à faciliter l’accès de leurs salariés au vélo pour leurs déplacements domicile/travail, soit par le prêt d’un vélo soit par une aide à l’acquisition d’une bicyclette. Ces employeurs bénéficient d’exonérations fiscales et sociales, sans que ces aides ne soient assimilées à des avantages en nature pour le salarié.
Une autre bonne idée piochée chez les Belges consisterait à verser au salarié qui choisit le vélo comme principal mode de déplacement dans ses trajets domicile/travail une indemnité kilométrique qui, si l’on copie nos voisins, serait de 21 centimes d’euros par kilomètre parcouru. Son montant pourrait aussi être déterminé dans le cadre d’un Plan de déplacement d’entreprise. L’employeur qui verserait cette indemnité - équivalente à la prime de transports pour les frais de carburants et qui serait combinable au remboursement de l’abonnement de transports collectifs - serait exonéré de cotisations sociales et patronales. Le salarié, lui, ne verserait pas d’impôt sur le revenu tiré de cette indemnité, que le Club évalue à « 350 euros par an et par personne ».
Être payé pour pédaler, c’est bon pour la Sécu
Le principe de cette « indemnité vélo » a été adopté par l’Assemblée nationale l’année dernière mais le ministère des Finances a posé son veto en novembre dernier. « C’est Bercy qui bloque. Pourtant, il faut avoir à l’esprit que faire 30 minutes de vélo par jour permet à la Sécurité sociale d’économiser 1000 euros par an en frais de santé », avance Jean-Marie Darmian.
Selon un article scientifique (dont on retrouve la mention dans cette étude sur Les coûts et les avantages des vélos en libre service, menée par le Commissariat général au développement durable en 2010) , « le bénéfice lié à la réduction du risque cardio-vasculaire est ainsi valorisé à hauteur de 0,5 à 1 €/km pour le vélo ». De quoi permettre des économies substantielles pour le système de santé, de l’ordre de 15 milliards d’euros par an si 12 à 15% des Français se mettaient en selle, a calculé le Club des villes et territoires cyclables.
La bicyclette pâtit de l’attachement des Français à leur voiture
Le problème, c’est qu’ « en France, le vélo n’est pas pris au sérieux en tant qu’élément de la chaîne des mobilités, qui est utile au développement économique et à l’environnement », regrette Jean-Marie Darmian qui est aussi maire de Créon, en Gironde. En cause, selon lui, « le lien historique que la France entretient avec l’industrie automobile ».
Pourtant, le succès des systèmes de vélos partagés (du type Vélib à Paris et Vélo’v à Lyon) « montre que, quand on met un outil efficace à disposition des usagers, ils y adhèrent facilement ». « Les mentalités évoluent », ajoute celui qui va lancer dans sa commune, à la rentrée, un système de vélo en libre service pour les écoliers.
Les dix-neuf enquêtes « Ménages Déplacements », réalisées en France et analysées dans un document du Certu (Centre d’études sur les réseaux, les transports, l’urbanisme et les constructions publiques) intitulé Et si les Français n’avaient plus seulement une voiture dans la tête ?, confirment cette tendance. Même si le vélo est perçu comme un mode de transport plus dangereux que la voiture et les transports en commun, il bénéficie désormais, auprès des Français, de 63% d’opinions positives.
A quand un plan national de promotion du vélo ?
« Les gens sont nettement plus prêts qu’avant, pour de multiples raisons, à passer aux modes alternatifs à la voiture », note l’étude. Reste que la bicyclette n’est utilisée que dans 3 à 4 % des déplacements quotidiens des Français, bien que l’on soit parmi les trois plus gros acheteurs de vélos au monde.
Pour le Club des villes cyclables, il est donc temps de sortir tous ces vélos des garages et de doter enfin la France d’un plan national de promotion du vélo, à l’image de ceux dont se sont dotés tous nos voisins européens.
Certes, il y a bien un Monsieur Vélo au ministère du Développement durable, chargé de coordonner le développement de l’usage du vélo. « Mais il passe beaucoup plus de temps à régler les problèmes de réglementation et de communication qu’à promouvoir ce mode de déplacement », estime Jean-Marie Darmian. Monsieur Vélo (de son nom Dominique Lebrun) n’a pas pu lui répondre. Il était en déplacement d’une semaine quand nous avons cherché à le joindre. A vélo, les trajets ont certes tout bon, mais ils sont plus longs...
Chez nos voisins
Les champions européens du vélo sont les Hollandais (27% de la population utilise le vélo comme principal mode de transport) et les Danois (18%). Malgré le programme « Cycle to work », seuls 2% des Britanniques enfourchent leur vélo quotidiennement.
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