Barbies, voitures télécommandées et peluches déferlent dans les magasins pour Noël. Une avalanche chinoise puisque plus de 70% des jouets vendus à travers le monde sont fabriqués dans ce pays. Les scandales sanitaires n’ont pas eu raison de cette industrie où les camions de nos bambins sont fabriqués pour quelques centimes seulement, au détriment des droits des quelques 4 millions d’ouvriers qui les produisent à la chaîne. Dans son nouveau rapport publié le 5 décembre, l’ONG chinoise Sacom (Etudiants et universitaires contre la mauvaise conduite des entreprises) pointe du doigt l’inaction des géants du jouet comme Mattel ou Disney pour protéger les travailleurs de leurs sous-traitants chinois, sous couvert d’une certification bidon.
12h par jour, 6/7 jours
L’ONG a décidé d’enquêter après le suicide le 16 mai 2011 sur son lieu de travail de Nianzhen Hu, ouvrière chez un fournisseur de Mattel. Sa famille affirme qu’elle subissait de nombreuses pressions et réprimandes. Les enquêteurs de l’association se sont rendus entre juin et octobre 2011 dans 3 usines basées dans la province de Guangdong au sud de la Chine. En cette période de l’année, les usines tournent à plein régime en prévision des fêtes. Les ouvriers, majoritairement des migrantes chinoises éloignées de leur famille, travaillent 11 à 12 heures par jour et 6 jours sur 7 pour un salaire de base de 130 à 160 euros mensuel. Les heures supplémentaires peuvent aller jusqu’à 140 heures par mois, 4 fois plus que la limite légale, pour gagner à peine plus de 300 euros.
A ce salaire de misère s’ajoutent des conditions de travail difficiles : outre le cumul des heures, la sécurité est minime (équipement inadéquat pour la manipulation des produits chimiques, pas d’alarme incendie ou pas d’extincteurs), peu d’assurance sociale, hygiène des cantines et dortoirs déplorables, pression des superviseurs, amendes pour être aller aux toilettes sans autorisation... la liste est longue. En sept ans, il n’y a eu aucune amélioration, constate l’association qui surveille les conditions de travail de l’industrie du jouet en Chine depuis 2005. En 2010, deux ouvrières ont été empoisonnées par un produit chimique, un autre est décédé suite à un accident sur une machine ancienne et trois enfants (de 14 et 15 ans) travaillaient pour l’été dans l’une des usines infiltrées.
Des audits faussés
Ces trois usines sont pourtant certifiées par l’ICTI, le Conseil international des industries du jouet, regroupant 780 marques, dans le cadre de son « programme CARE » pour une « fabrication éthique des jouets » via divers audits. Pour l’ONG Sacom, ICTI CARE n’est « qu’une combine pour couvrir l’exploitation des travailleurs chinois par les multinationales ». Selon l’association, les usines de sous-traitants paient l’ICTI pour passer les audits et même les ouvriers pour mentir. Les marques comme Mattel peuvent ainsi « fuir toute responsabilité puisque l’ICTI s’occupe du contrôle des conditions de travail ».
C’est à ce prix que, par exemple, plus de trois poupées Barbie sont vendues chaque seconde dans le monde.
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