Gilles Demailly est maire PS d’Amiens et président d’Amiens Métropole.
Vous terminez votre premier et dernier mandat de maire d’Amiens (Somme). Quelles difficultés avez-vous rencontrées dans votre action pour le développement durable ?
Bien que dirigée pendant dix-neuf ans par un ex-ministre des Transports, Gilles de Robien (UDF), Amiens se trouvait en 2008 dans une situation paradoxale : beaucoup de bus, mais de moins en moins d’usagers, car les lignes ne passaient pas par le centre, ni même par des voies réservées. Les horaires n’étaient jamais respectés. Il fallait un choix politique clair pour leur donner la priorité, via des couloirs et en limitant la place de la voiture. Résultat, la fréquentation augmente. Mais je me suis heurté aux opposants traditionnels – riverains, commerçants –, à une partie de la droite et aussi aux responsables locaux du PS, qui m’ont publiquement critiqué. Dès que le stationnement résidentiel devient payant, les gens râlent. Or, certains élus s’intéressent avant tout aux résultats des élections…
Les obstacles sont-ils également d’ordre financier ?
Si dans notre agglomération de 180 000 habitants on veut que 40 % des déplacements se fassent en transports en commun, contre 9 % actuellement, nous devons nous doter d’un tramway. Mais nous avons besoin de l’aide de l’Etat et on attend les résultats de l’appel à projets « transports en commun en site propre ». La baisse des dotations de l’Etat est catastrophique. Nous avons, par exemple, priorisé la rénovation des logements sociaux, qui sont des passoires thermiques. Cela coûte près de 50 000 euros par logement ; l’Etat verse entre 1 euro symbolique et 13 000 euros !
L’échelon local est-il le plus adapté au développement durable ?
Oui. Mais pour une politique autonome, il faut agir dans le cadre du pays. Nous développons, par exemple, l’agriculture de proximité dans le Grand Amiénois – 340 000 habitants, pour moitié dans des communes rurales. La réalisation du Scot (schéma de cohérence territoriale) a été une bataille pour arrêter de consommer des espaces agricoles. Et nous avons plusieurs conventions pour valoriser les produits en circuits courts ou via la cantine scolaire.
Pourquoi ne pas vous représenter ?
Je m’y étais engagé devant mes colistiers, même s’ils pensaient que je prendrais goût à l’action. J’avais aussi prévenu qu’à 65 ans j’arrêterais. Je n’aime ni le cumul des mandats, y compris dans le temps, ni la gérontocratie ! Cela paraît un peu contradictoire après avoir lancé tant de chantiers « durables », mais ce sont des projets collectifs. Moi, je suis enseignant-chercheur en chimie, pas professionnel de la politique : avant d’être élu maire, je n’ai candidaté à rien et n’ai été que conseiller municipal d’opposition, jusqu’en 2001, après avoir été élu président de l’université de Picardie. Je mène le combat d’idées depuis quarante ans, je le poursuivrai d’autres façons. —
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